Benjamin Pehau a posé ses valises dans la cité épiscopale cet été pour venir garnir le poste d’ouvreur du Sporting Club Albigeois. Ce pur béarnais qui a commencé le rugby à Pont-Long, nous a accordé un entretien grand format pour nous parler de ses débuts rugbystique dans son village natale tout comme de sa formation à la Section Paloise avant de voguer vers la Pro D2 au SAXV. Celui qui peut aussi évoluer au piste de centre nous a aussi éclairé sur sa venu au SC Albi et les raisons qui ont motivé son choix, ainsi que sur sa volonté de réaliser une belle épopée avec cette équipe new look des jaunes et noir. Rencontre avec un Benjamin Pehau qui panse les derniers stigmates de sa blessure à la pommette avant de ré-attaquer la dernière ligne droite de Nationale avec le club tarnais .

Pour toi, cette année sonne comme un nouveau défi, un virage donné à ta carrière. Une carrière qui a commencé au cœur de tes terres natales, le Béarn ?
Exactement, dans le club du village à Pont-Long où j’ai fait toutes mes classes à l’école de rugby. J’en garde forcément de très bons souvenirs, je me suis fait des amis là-bas qui étaient les enfants des copains de mon père, j’ai toujours gardé ce cercle-là et j’affectionne d’aller voir les matchs quand je rentre d’autant plus que mon petit frère joue maintenant là-bas. C’est un endroit où j’aime bien aller et où je me sens bien.

Garder les connexions avec ce qu’on appelle » le rugby village » fait aussi du bien pour rester un peu les pieds sur terre ?
C’est ça, surtout de voir les copains ou les potes qui jouent le dimanche et bossent le lundi permet de ne pas non oublier d’où l’on vient. J’affectionne d’aller voir le rugby amateur car je trouve que c’est cool, c’est une passion donc c’est bien. C’est sûr que quand je rentre chez moi à Pau, je ne loupe pas un match quitte à faire une heure de voiture pour voir les potes donc c’est cool.

Tu es né dans une terre bénie pour le rugby, le Béarn, où on sait que le rugby est roi comme dans le Gers ou dans le Pays Basque et quand on est un petit béarnais, on rêve avant tout de jouer à la Section Paloise. C’est quelque chose qui t’est arrivé puisque tu as été recruté par le centre de formation et les espoirs de Pau ?
C’est ça. Je suis allé à la Section via la catégorie minimes mais il est sûr que dès lors que j’ai eu le droit et l’âge d’aller au stade, j’y allais avec mon grand-père. Comme tu l’as dit, quand tu es un gosse et que tu es né dans le Béarn, tu rêves de jouer pour la Section; mes idoles étaient Damien Traille et les mecs comme ça qui ont porté le maillot au stade du Hameau. Dans le vieux stade du Hameau, il y avait encore la tribune avec écrit Pau en lettre jaunes sur les sièges bleus, ça mettait des étoiles dans les yeux.

Ça a dû te faire bizarre la première fois que tu as enfilé ce maillot, te donner des frissons comme on dit ?
Oui, ça a fait des frissons, en plus, en jeunes, on avait les maillots avec le Pic du Midi en grand dessus, il maintenant en petit ce qui, au passage, est quand même un petit regret (rires). C’était une joie et une fierté pour moi mais aussi surtout pour mes proches.

A Pau, tu as croisé un jeune oloronais qui est maintenant ton coéquipier, Baptiste Couchinave ?
Exactement, Baptiste Couchinave avec qui j’ai passé de bons moments à Pau pour en passer maintenant de bons à Albi. Je suis très content de rejouer avec lui, il était un peu plus jeune donc je pense qu’il rongeait un peu son frein à la Section et je suis très content qu’il puisse s’exprimer pleinement aujourd’hui et je me régale tous les jours avec lui.

Il y a ensuite un second virage dans ta carrière où tu t’émancipes un peu de ton Béarn natal en allant dans les Charentes, à Soyaux-Angoulême. Comme on dit, tu es sorti de ta zone de confort ?
Pour le coup, ça a été un gros, gros changement. J’avais tout le monde à Pau, ma famille, mes amis et en fait, j’avais connu le directeur du centre de formation au Pôle Espoir de Bayonne où il faisait la préparation physique des jeunes joueurs. Il m’a appelé en me disant » je prends le centre de formation d’Angoulême, est-ce que ça t’intéresse ? « . J’ai regardé où c’était sur la carte et ce n’était pas trop loin donc j’ai dit » allez, on y va » mais oui, ça a été un gros changement puisque je ne connaissais personne en arrivant là-bas, vraiment personne, personne. Ça a été formateur et aujourd’hui, je ne regrette pas.

Tu es passé d’un club à un autre complètement différents : Pau, c’est l’institution et le bastion séculaire du rugby tandis que Soyaux-Angoulême était la ville qui montait dans le rugby moderne ?
Tout à fait. L’année où je pars de Pau en 2017, ils raflaient tout, c’était la période Simon Manning avec les premières grosses recrues comme Jean Bouilhou ou Damien Traille qui revenait au pays mais aussi les premiers All-Blacks qui arrivaient. Pour être honnête, quand je suis parti à Soyaux-Angoulême, je ne savais pas qu’il y avait du rugby là-bas mais j’y ai découvert un monde amateur / famille qui m’a beaucoup plu et qui m’a beaucoup rappelé mon premier club. C’est pour ça que je suis resté aussi longtemps là-bas et que je m’y suis plu.

Qu’est-ce que tu retiens de ce passage à Soyaux-Angoulême ? Bien sûr la remontée en Pro D2 l’année dernière mais aussi tes premiers pas dans cette Pro D2 qui fait rêver tous les joueurs ?
C’est ça, encore aujourd’hui, je me sens hyper redevable envers ce club parce qu’il m’a donné beaucoup de choses. Avant tout, il m’a donné mes premiers pas en pro ainsi que mes premiers salaires donc ce sont des choses importantes, des choses que l’on n’oublie pas. Tous les gens qui œuvrent pour que ce club se développe, tout le travail qui est fait autour par des gens vraiment bienveillants sont aussi des choses que l’on n’oublie pas. Il y a la première en pro, des trucs comme ça, plein de souvenirs qui remontent.

A la fin de saison l’année dernière à Soyaux-Angoulême, tu savais déjà que tu partais à Albi. Ça a dû être un sentiment bizarre entre le sentiment du devoir accompli avec la remontée en Pro D2 tout en sachant en même temps que l’aventure s’arrêtait et que tu allais en découvrir une autre ?
C’est certain. Le déclic s’est fait quand on est descendu, il me restait un an de contrat et je me suis posé la question de partir ou pas mais j’avais à cœur de faire partie de l’équipe qui allait faire remonter ce club car, en fait, je me sentais redevable par rapport au club de par toutes les choses qu’il m’avait donné. Ce qui a été le plus » contradictoire « , c’est qu’en fin de saison, je savais que j’allais partir mais au final, je jouais libéré et je me sentais bien dans ma peau car j’essayais de tout mettre en œuvre pour faire remonter ce club. L’issue nous a été favorable donc j’étais hyper content en partant.

On sait que quand vous êtes dans un club, il y a une chose qui compte beaucoup pour vous, les joueurs de rugby, à savoir le discours des coaches. Quels ont été les éléments de discours de Mathieu Bonello et d’Alexandre Albouy qui t’ont donné la flamme pour le SCA ?
Ils m’ont présenté le projet. Pour être honnête, on n’a pas beaucoup parlé de rugby lors des entretiens que l’on a eu ou alors très peu mais on a surtout parlé du projet, des valeurs humaines, de comment étaient les joueurs et de comment ils devaient se comporter. Je pense qu’on le voit de par l’éducation qu’ont eu Mathieu et Alex, c’est centré sur le plaisir et sur le vivre ensemble et ça, ce sont des choses qui me parlent. En ayant eu aussi des échos d’Hugo Boutin et de Baptiste Couchinave qui m’ont confirmé ce que j’avais senti pendant les entretiens, je me suis en fait dit » c’est là que j’ai envie d’être « .

Tu nous tends la perche car, en effet, tu n’arrivais pas en terre inconnue puisque tu avais déjà rencontré Hugo Boutin à Soyaux-Angoulême. Tu avais rencontré Baptiste dans ta » première » vie rugbystique et dans la » seconde « , ça a été au tour d’Hugo Boutin ?
C’est ça et je sais aussi comment sont ces mecs-là et comment ils se comportent. Je sais qu’on vit un peu de la même façon et je me suis dit » si eux s’épanouissent là-bas, ce n’est pas anodin et je vais forcément y trouver mon bonheur aussi » et, au final, c’est ce qui se confirme sur mes premiers mois ici à Albi.

En passionné de rugby que tu es, j’imagine que tu savais mettre Albi sur la carte depuis longtemps et que tu les avais déjà vu jouer contre Pau. Comment est-ce que tu appréhendais ce club et comment est-ce que tu le voyais à l’époque de l’extérieur, quand tu étais Palois et Angoumoisin ?
C’est vrai que je savais où était Albi (rires). A l’époque, c’était un bastion et il y a un autre joueur dont je n’ai pas parlé, André Hough, qui était à Pau quand moi j’étais tout petit, je me rappelle que le stade scandait son nom quand il réussissait un coup de pied. J’avais reparlé d’Albi avec Younes El Jai qui était à Angoulême en même temps que moi donc je savais qu’il y avait beaucoup d’histoire ici, je savais aussi qu’il y avait eu quelques histoires compliquées dernièrement avec ces remontées un peu échouées. Il est sûr que tout ça a pesé dans la balance et aujourd’hui, je me sens bien car, comme tu l’as dit, c’est une terre de rugby mais c’est aussi un endroit où on travaille bien et où on nous incite à être performants au quotidien ce qui est bien.

On a l’impression qu’avec le groupe cette année, alors que pour les 2/3 ou la moitié, vous n’avez pas un vécu ensemble que depuis quelques mois, vous êtes soudés. On le voit pendant les matchs, il ne peut quasiment rien vous arriver car vous vous serrez les coudes dans les moments durs ?
Il est sûr qu’on se serre les coudes mais se serrer les coudes se travaille aux entraînements, ça se travaille aussi en dehors du rugby et les gens vont forcément penser à la bringue mais non, il n’y a pas que ça. Il y a découvrir les autres, apprendre comment ils vivent, s’introduire dans leurs cercles familiaux et le reste et je trouve que tout ça est hyper important. Si je prends l’exemple de Romain Maurice, que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam en arrivant ici, on mange aujourd’hui ensemble deux ou trois fois par semaine parce-que ça a matché et que c’est une sorte de coup de cœur amical comme il y en a eu d’autres ici. Je trouve que c’est aussi ça qui fait la force d’une équipe, on ne va pas forcément partir les 42 ensemble en vacances dans 10 ans avec nos familles mais en tous cas, avoir des liens très resserrés sur l’instant T, c’est certain que ça peut nous aider sur cette fin de saison.

Pour toi qui as connu la Nationale l’année dernière avec Soyaux-Angoulême, est-ce que tu corrobores le fait que ça tape plus fort cette année ? On a l’impression que maintenant, le haut de tableau s’est grandement resserré alors que l’année dernière, on connaît déjà les 5 / 6 qui seraient en phase finale. Est-ce que tu vas dans ce sens ?
Oui, je trouve que ça tape plus mais aussi que ça joue mieux au rugby ce qui, je pense, justifie le fait que la Nationale ait augmenté de niveau. Moi, en tous cas, en étant N°10, je trouve que ça joue mieux au rugby, qu’il y a aussi plus d’approches tactiques de la part des équipes, le niveau est maintenant relevé et, au final, on se rend compte qu’à part peut-être 2 ou 3 matchs dans l’année, il ne faut jamais se relâcher le week-end et toujours être à 100% car il y a des surprises à toutes les journées.

Parlons un peu de toi. Tu as eu une blessure malheureuse au plancher orbital à l’entraînement, est-ce que tu es prêt pour revenir sur le terrain d’ici quelques semaines pour être là dans le money-time comme on dit ?
C’est Baptiste qui m’a mis un coup de coude à l’entraînement, pas de manière intentionnelle, enfin j’espère (rires). Il m’a fracturé l’os malaire donc j’ai dû me faire opérer, une petite opération et, normalement, je devrais être apte pour la fin du mois de Mars ou début Avril. On croise les doigts, en tous cas, on fait un peu de travail physique ce qui ne fait pas de mal et on supporte les copains.

On voit que malgré que tu ne sois pas là, Théo Vidal et François Fontaine reprennent le flambeau derrière et le reprennent avec brio ?
C’est bien mais de toute façon, on dit tout le temps que pour avoir des résultats, il faut plus qu’une équipe, il faut un groupe. Quand tu as un groupe, tu peux mettre » n’importe qui » et le niveau de l’équipe ne baissera pas donc je suis franchement très content pour les deux. Je m’entends très bien avec François que j’ai aussi connu à Soyaux-Angoulême et avec Théo qui est une découverte cette année donc je suis content que ça se passe bien. Tant mieux pour eux, ça leur donne de la confiance mais tant mieux aussi pour l’équipe.

On s’approche des derniers matchs des phases régulières et de potentiels play-off pour Albi. Est-ce que tu sens monter, non pas l’adrénaline, mais un peu une flamme dans le groupe ?
En tous cas, je l’espère (rires). Je ne suis pas avec eux sur le terrain aux entraînements collectifs pour le sentir mais il est sûr qu’on commence à en parler ce qui est normal. On joue tous pour vivre ces matchs-là et ces moments-là, pour les avoir vécus avec Soyaux-Angoulême l’année dernière, ce sont des moments à vivre. On n’en est pas encore là, il faut faire le travail d’ici là et on aura un peu de temps pour se poser et vraiment y basculer d’ici deux mois.

Merci et on te souhaite une belle fin de saison avec le Sporting Club Albigeois
Merci à toi.

Propos recueillis par Loïc Colombié

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