Lee Adriaanse, à bientôt 35 ans est riche d’une belle carrière qui l’a menée de son Afrique du Sud natale à Blois, en passant par Aurillac, Chambéry et Lavaur. A quelques heures du derby tarnais de Federale 1 face à Mazamet, celui qui a embrassé un double projet à Sport 2000 Graulhet lors de sa signature à Lavaur nous a longuement parlé de ses aventures dans l’ovalie Française, tout en louant son épanouissement dans la pluri-activité. le demi de mêlée / ouvreur de l’AS Lavaur a aussi fait un point sur la situation sportive des tarnais qui, sont à lutte pour se maintenir, sans oublier de nous évoquer son avenir rugbystique.

Lee, on peut dire que tu as eu un parcours assez riche et varié au travers de la France
Effectivement, j’ai un parcours un petit peu particulier. Je suis né en Afrique du Sud dans la ville du Cap, je suis venu en France pour le rugby et tracé un peu ma petite route. Aujourd’hui, je suis vendeur au Sport 2000 de Graulhet et joueur à Lavaur où je m’éclate complètement.

Le Cap et l’Afrique du Sud, terres de rugby. C’était donc logique pour toi de jouer au rugby ?
C’est un rituel, j’étais obligé de le faire. Au début, j’ai commencé par le tennis et mon entraîneur m’a dit » écoute, tu as la coordination pieds / mains, tu ne veux pas tenter le rugby ? « . Pour nous les métissés, à l’époque avec l’apartheid, le rugby était un petit peu un sport de blancs mais je m’y suis mis, je me suis follement éclaté et depuis, je n’ai pas regardé en arrière.

Comment de l’extrême sud du continent Africain, au Cap, on arrive à Blois, en France, au milieu des châteaux de Touraine ?
Mon père, qui était aussi joueur de rugby, a fait une tournée en France où il a lié connaissance avec des joueurs de Blois. Il a gardé contact en appelant et en écrivant et l’un de ses joueurs, Thierry Foucher, est devenu l’entraîneur de Blois. Un jour, il a demandé à mon père si l’un de ses fils ne voulait pas venir et il a répondu » oui » du coup, mon frère et moi sommes partis jouer à Blois dans le Loir-et-Cher.

C’est là où la belle aventure commence puisqu’après, tu vas à Aurillac en Pro D2, dans l’antichambre de l’élite ?
J’ai eu une occasion exceptionnelle pour jouer en espoirs à Aurillac. Tout est venu très vite car leur demi de mêlée a eu une grosse blessure et j’ai du coup signé mon premier contrat pro comme joker médical pendant un an suivi de trois ans de pro après. Je jouais avec de gros joueurs comme Maxime Petitjean, Paul Boisset, Latu Maituku et plein d’autres, l’aventure a vraiment commencé et je vivais ma passion comme un sport.

En plus, Aurillac est un club spécial en Pro D2 puisque c’est le plus petit budget, c’est un club très famille au milieu du Cantal. Est-ce que c’était important pour toi d’avoir un club à échelle humaine ?
Oui parce-que là, on ne vit que pour le rugby, on se voit tous les jours, on boit un café et c’est aussi là que j’ai rencontré ma femme, Emmanuelle. On s’est éclaté là-bas, on y a eu notre premier enfant et à Aurillac, même s’il y a d’autres sports, il n’y a que le rugby, les gens vivent rugby. En plus, c’est le pays le plus froid donc on se consomme, il y a une espèce de sentiment là-bas où c’est la famille, la grande famille et cette ville d’Aurillac m’a vraiment touché.

A l’époque, il y avait déjà des matchs entre Aurillac et Albi avec une certaine rivalité, je pense notamment à la course aux play-offs en 2015 ?
Tout à fait, en plus en 2014, mon entraîneur à Aurillac était Pierre-Henry Broncan et son père entraînait Albi, du coup, il y avait une grosse rivalité. Le match contre Albi était le match attendu de toute l’année, ce n’était pas un derby mais c’était quand même quasiment comme ça avec le père contre le fils (rires).

Tu pars du Cantal, des montagnes et du Massif Central pour aller dans une autre montagne, les Alpes, à Chambéry. Qu’est-ce qui t’amène à aller relever le défi de Chambéry ?
J’arrive à Chambéry grâce à Michel Ringeval qui m’appelle car il m’avait vu jouer à Lyon à Aurillac et qui me dit » j’ai besoin de tes capacités et de ton leadership « . Je n’ai pas hésité car les dernières années à Aurillac avaient été un peu plus compliquées et je cherchais un nouveau challenge, un revivre un petit peu cet esprit que j’avais à Aurillac au début. Je l’ai trouvé plein pot à Chambéry avec Michel Ringeval et Cyril Villain, j’ai passé 4 ans là-bas dans les Alpes et c’était aussi magnifique. C’était autre chose qu’Aurillac qui est une petite ville car à Chambéry, tu as Lyon et Grenoble qui sont à côté et du coup, de voir autre chose était parfait y compris pour ma femme.

Sportivement, tu y as vécu un grand moment à savoir la finale d’accession à la Pro D2 face à Nevers où, après le match aller, on était beaucoup à penser que Chambéry avait un pied et demi en Pro D2 ?
Il y a deux souvenirs qui me reviennent en tête, la finale contre Bayonne avec Aurillac et ensuite la finale avec Chambéry contre Nevers pour monter en Pro D2, ce sont vraiment les deux finales qui m’ont touché. On gagne le premier match à la maison et on se dit que c’est possible pour Chambéry qui était l’un des plus petits clubs mais chez eux, malheureusement, ça ne tourne pas en notre faveur. C’est quand même une expérience mémorable qui restera à vie dans ma tête.

L’année d’après est un peu une année noire car vous êtes premiers ou seconds quasiment tout le long de la saison en Fédérale 1 Elite mais quand vous reprenez la saison, en plus pour un match contre Albi, la DNACG et la Fédé vous disent » vous ne pouvez pas monter ni faire de play-off et vous avez -8 points au classement « . Comment est-ce qu’on vit ça quand on est joueur ?
On a en effet appris la triste nouvelle juste après Noël. Ça a été difficile car nous, entre joueurs, on avait quand même un objectif que l’on voulait atteindre et malheureusement, le club ne pouvait pas le suivre. C’est vrai que ça a été un coup dur mais on s’est réuni deux semaines après en se disant » les gars, soit on joue petit jeu et on se met un peu dans notre bulle soit, même si on ne monte pas, on montre quand même qu’on est de grands joueurs et de grands garçons qui peuvent assumer les choses « . On fait quand même une très bonne saison malgré cette tristesse qui était présente.

Tu décides ensuite de basculer dans la pluriactivité, entre autres ici à Sport 2000, chez l’un des partenaires du #MagSport. Tu as eu une belle carrière pro donc qu’est-ce qui t’a amené à faire ce choix de la pluriactivité qui est quand même une autre façon de voir le rugby ?
Je suis arrivé à Lavaur en ayant un peu mis la vie professionnelle de côté et du coup, avec le club, on a rencontré Julien Poux dans le magasin Sport 2000. Je le remercie énormément car avec le CV que j’avais à l’époque, je n’avais été que joueur professionnel et je n’avais jamais travaillé avant, il m’a accueilli à bras ouverts et aujourd’hui, je m’épanouis complètement dans ce monde-là.

Pour faire le petit clin d’œil et le paradoxe, on connaît la rivalité entre Graulhet et Lavaur et toi, tu joues à Lavaur tout en étant vendeur dans le Sport 2000 de Graulhet. Tous les joueurs de Graulhet passent toute la semaine donc, comme on dit dans le rugby, ça doit mettre un peu des pièces ?
C’est ça le monde du rugby, on met un peu des pièces mais ça se fait dans l’amitié. Il y a aussi plein de mecs que je recroise à la salle de sport à Graulhet et ce sont des mecs qui sont supers. Quand on passe cette étape et qu’on franchit les lignes blanches, c’est un petit peu autre chose comme, par exemple, l’année dernière avec les deux derbys que l’on avait. On garde quand même l’amitié en-dehors des terrains et on a vraiment de bonnes affinités.

Tu ne regrettes pas d’être passé à la pluriactivité ?
Non, je ne regrette absolument pas. J’adore la mode, les chaussures et ça m’ouvre aussi les yeux sur autre chose et sur ce que je veux faire après le rugby. Je n’ai jamais connu d’endroit où travailler et c’est aussi là que j’apprends énormément avec Julien dans son professionnalisme, la façon dont il travaille, c’est toujours sérieux et honnête. J’apprends des choses parce qu’avant, je ne connaissais pas ça et je suis très content de travailler avec Julien qui m’a donné cette opportunité de me faire grandir pour plus tard.

Parlons de ton club de Lavaur et de sa saison. Une saison qui est dure et compliquée mais vous ne lâchez pas ?
Non mais de toute façon, ce mot-là n’existe pas dans la parole d’un rugbyman, on ne baisse pas les bras. C’est vrai que c’est compliqué cette année avec beaucoup de changements, de nouveaux entraîneurs qui font un boulot énorme, il y a aussi beaucoup de nouveaux joueurs. Ça commence à prendre un peu mais on a encore besoin de temps, j’espère que ça va se passer cette année, on se bat pour le maintien mais je crois fortement que ça va se faire. Espérons que l’on fera une meilleure saison l’année prochaine mais j’en suis quasiment sûr.

Pour faire un pas vers le maintien, il y a un derby ce week-end contre Mazamet et ça passe par une victoire face au voisin mazamétain ?
Exactement. On n’a pas beaucoup de derbys cette année mais celui-ci contre Mazamet est très important. On a perdu de peu au match aller chez nous et on sait que, de toute façon, on n’a rien à perdre, ça va être un match clé dans la saison pour le maintien.

Dans le vestiaire de Lavaur, un peu à l’image de Gaëtan Bertrand qui, comme toi, était pro, vous amenez quand même une expérience, une sérénité et une sagesse ?
Tout à fait. Avec Gaëtan mais aussi Nico Clergue, qui me vient en tête, ce sont des mecs qui essayent de souder tout ça car c’est vrai qu’il y a beaucoup de nouveaux joueurs. Avec l’expérience de Gaëtan en Pro D2 et même plus haut, on essaye vraiment de la mettre comme clé pour nous faire avancer dans cette dernière ligne droite pour le maintien.

Comment va le plus jeune retraité du rugby en France, Gianni Gaillard, le nouvel entraîneur de la touche des espoirs de Lavaur ?
Il va bien. C’est un mec adorable, il fait je ne sais pas combien il fait, peut-être 2 mètres de haut mais il a aussi un cœur grand comme ça, c’est un mec génial. Il nous aide un petit peu plus avec les touches cette année parce qu’on avait un peu de mal et je lui souhaite tout le bonheur dans son nouveau rôle d’entraîneur de rugby.

Si on a bien compris, Lavaur et Lee Adriaanse, c’est une belle histoire qui va continuer l’année prochaine ?
Oui, on n’a pas encore signé mais je vais bien rester à Lavaur et du coup, rester travailler à Sport 2000 à Graulhet.
Propos recueillis par Loïc Colombié

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