Le manager du Sporting Club Albigeois a fait un tour d’horizon de la situation sportive actuelle chez les jaunes et noirs (2 défaites à l’extérieur et une courte victoire à domicile) a quelques heures du derby occitan face à Narbonne (6eme). Face aux ex pensionnaires de Pro D2 qui disposent d’une dynamique totalement inverse (d’eux victoire et une défaite), les albigeois (9eme) vont devoir reconquérir le Stadium tant sur le terrain que dans les tribunes. Focus avec Mathieu Bonello, sur une rencontre qui va sentir le souffre même si le coach albigeois tente de dédramatiser le contexte.
On va revenir sur ce match face à Hyères-Carqueiranne. 25 touches, 30 mêlées, on se serait cru dans un vrai match à l’ancienne et, comme on l’a dit, ça a été un peu une purge rugbystique mais il faut être deux pour en faire une ?
Il y a eu beaucoup de touches et de mêlées. On a eu les armes, j’avais trouvé qu’on avait quand même progressé le dimanche d’avant mais il est sûr qu’il y a eu beaucoup d’arrêts de jeu pour quand tu veux mettre du rythme.
Est-ce qu’il y a eu un manque de confiance de tes joueurs parce qu’il y avait possibilité de transformer le jeu ?
Non, autant on était un peu fébrile le dimanche précédent autant là, pas du tout. C’est juste qu’on a fait des choix stratégiques à des moments donnés où on a pété un câble, on a joué pour jouer et le rugby, c’est aussi respecter les fondamentaux et d’autres choses. On a eu plein de fois les armes pour gagner ce match, quand tu as autant de pénaltouches, autant de touches dans les 22, quand tu passes 8 minutes dans les 15 mètres d’en face et que tu ne reviens qu’avec 3 points, on a en fait pas été efficace. On a aussi manqué de maîtrise en plus de l’efficacité, dans le tournant du match, on mène 7 à 6 et il reste 2 minutes à jouer contre le vent, à l’extérieur donc tu as fait le job, tu contre-attaques de tes 22.
Tu as dit a la presse varoise que vous aviez été énormément sanctionnés dans les rucks ?
J’ai en effet répondu ça et, en revoyant le match, le gros secteur fort est encore la discipline. On a 5 fautes et 4 bras cassés ce qui fait 9, j’ai trouvé que ça avait été un bon match sur ça mais on a été sanctionné parce qu’on a eu la possession de balle et pas qu’un peu et le soutien sur l’offensif a été vachement pénalisé. J’ai parlé avec l’arbitre, il n’y a pas de problème là-dessus, je trouve qu’on a sanctionné l’équipe qui a essayé de jouer le plus mais, encore une fois, on ne se réfugie pas derrière ça.
Hyères avait mis un schéma en place qui était cousu de fils blancs. Qu’est-ce qu’il a manqué pour passer par-dessus cette stratégie ?
On a manqué d’efficacité, tu ne peux pas avoir autant de ballons, surtout en l’air parce qu’on a échoué en bas. On a été très bon dans le secteur de la mêlée, on a pratiquement eu toutes nos touches ballons en l’air mais c’est en bas que ça a péché. Je trouve qu’on n’a pas été efficace et c’est pour ça que le match a tourné. A un moment donné, en 2e mi-temps, alors que c’était eux qui étaient devant aux points, chez eux, je trouve que c’est nous qui n’avons pas été efficaces.
Du coup, est-ce qu’on peut dire que la réception de Narbonne est un premier tournant de la saison ?
Non, c’est un match de plus dans ce premier bloc. On n’a pas réussi à gagner à l’extérieur sur ce bloc, c’est une réelle déception, on prépare les matchs pour les gagner et il est sûr qu’on est déçu. Moi, je suis déçu mais il faut vite se reconcentrer, il y a un gros match et il ne faut pas s’arrêter que sur ce match-là en vue du prochain bloc.
Est-ce que, justement, Narbonne ne peut pas lancer sur le prochain bloc en fonction du résultat ?
Bien sûr mais je crois que d’abord, on va bien regarder ce bloc-là. Il faut qu’on le finisse de la meilleure des façons et ensuite, il sera temps de se projeter sur le suivant.
Pour boucler sur Hyères, et même s’il est facile de le dire a posteriori, vu que la dernière pénaltouche n’a rien donné, est-ce qu’il n’aurait pas mieux valu prendre les points au pied ?
Oui mais, vous savez, c’est aussi la coordination entre des choix stratégiques et des sensations. Pour l’instant, on a eu un peu de souci sur le tir au but mais je suis d’accord avec toi même si, quand tu as autant d’armes, c’est aussi à nous de mieux bosser devant. Je crois que, sur toutes ces pénaltouches, on en fait deux pas droites, trois ballons tombés dans le ballon porté. Pour celui en touche, à la limite, ils nous y ont poussé mais le reste, pfffff et ça m’embête quand même, ça m’embête vraiment et fortement car je pense que sans tout ça, ça n’est pas le même match. Si tu reprends les devants, je trouve qu’on y était donc il faut qu’on arrive à bien s’analyser comme on l’a fait puisqu’on s’est bien remis en question aussi. C’est une déception d’avoir perdu ce match.
Comment est-ce que tu as retrouvé les gars après ce match ? Abattus ?
Non, pas du tout. Ils étaient top car on fait nous aussi quelque chose dans notre fonctionnement, on se dit les choses. C’est parfois fait rapidement, parfois juste après le match ou bien le lundi puis on bascule vite sur autre chose car l’esprit de l’équipe est très sain. Ils ont besoin de vivre ensemble, de passer des moments ensemble et de construire leur saison. On est pleinement dans ça par contre, il faut gagner des matchs.
Est-ce qu’il y a quand même de la pression avant Narbonne ?
Non, il ne faut pas déjà se mettre de la pression au 4e match. C’est juste parce qu’on n’a pas gagné à l’extérieur, si on en avait gagné un des deux, il n’y aurait pas cette question-là. On sait où on veut aller, on sait comment on veut y aller et je trouve justement que l’équipe est convaincue. Elle a besoin de passer du temps et je trouve qu’on a progressé, même si ce n’est pas le rugby qu’on veut faire à l’heure d’aujourd’hui mais il faut aussi qu’il y ait des joueurs qui passent devant et c’est à nous le staff de montrer la voie.
En fonction du résultat, tu vas envoyer un signal, qu’il soit positif ou négatif, aux autres équipes ?
Quand tu gagnes, tu envoies tout le temps un signal et quand tu perds, tu en envoies un autre, tu le sais, c’est pareil. Ce n’est pas ce match-là qui fera changer le signal, c’est réellement un match de plus.
On est en fin de bloc et Narbonne arrive sans pression. Pour eux, ça n’est que du bonus s’ils font un résultat à Albi ?
Oui, bien sûr. Je crois qu’il faut qu’on se cantonne sur nous car aujourd’hui, on n’a pas fait un match abouti de A à Z ni un match de folie depuis le début donc, ce que je demande aux joueurs, c’est aussi de reproduire ce qu’on peut faire à l’entraînement. Il faut gagner des matchs pour être dans la compète et là, c’est ce qu’il nous manque, il nous manque parfois un petit quelque chose qui fera que. Je pensais que l’essai qu’on a mis à Hyères, qui est magnifique puisqu’on a mis un essai de 80 mètres et peut-être qu’on n’en a pas mis un comme ça l’année dernière, nous aurait donné l’énergie de nous dire » putain, on est capable de ça « . Les joueurs se sont investis mais il a manqué plein d’autres choses.
Est-ce que tu as l’impression que les joueurs jouent encore avec le frein et qu’il y a peut-être un déclic à trouver ?
Il y avait moins de frein que le dimanche d’avant contre Rennes à la maison, j’ai trouvé qu’il n’y avait rien à voir. Par contre, ils ont besoin du déclic du copain ou de la passe supplémentaire et ça, c’est en passant du temps qu’ils vont se trouver mais en tous cas, je suis très content de l’état d’esprit qu’il y a. Maintenant, il faut gagner des matchs ce qui va nous permettre de lancer définitivement cette saison mais il faut aussi accepter que l’on aimerait mieux et plus et que les matchs qui vont arriver seront de gros calibres et qu’il faut donc se préparer à rencontrer de grosses équipes.
A chaud, on a eu l’impression que dans les moments charnières et dans les moments durs, chacun a un peu essayé de faire la sienne au lieu d’être patient et de plus trouver le collectif ?
Exactement. Je pense que si on reste dans le cadre, qu’on est patient et qu’il y ait des mecs qui mènent notre rugby, je suis convaincu qu’on aurait remporté le match. Je ne peux pas leur en vouloir car chacun à sa façon a voulu amener à l’équipe mais, comme tu l’as dis, ça a été désorganisé. Du coup, finalement, dans le résultat, quand tous ne font pas la même chose, tu n’es pas efficace et c’est exactement le cas d’une pénaltouche. C’était quand même un point fort que l’on avait et on n’a pas changé grand-chose sur ça donc je sais qu’on va retrouver cette efficacité parce-que ça y est, je sens que les joueurs sont vraiment en train de s’approprier le projet.
Ils annoncent de la pluie samedi. Est-ce que ça peut être un facteur ?
Oui même si je pense que ça ne sera pas pénalisant pour nous. Je pense qu’on est une équipe capable de jouer au cœur de l’hiver, il faut s’y habituer, on ne va pas jouer qu’avec du soleil comme on le fait depuis le début mais il est sûr que ce sera un facteur à prendre en compte.
Est-ce que tu vas continuer ta revue d’effectif car il y a des joueurs qui n’ont toujours pas matché ou qui n’ont pas été dans le groupe ? Je pense à Charly Trussardi et Pilbarnon Djossou
Les deux que tu viens de citer sont blessés, Charly en aura pour un peu plus longtemps que prévu et Pilbarnon reviendra soit cette semaine soit l’autre. Je pense qu’aujourd’hui, on a quand même vu certaines têtes qui ont un peu changé, on a aussi fait des choix ce week-end pour lancer des mecs et en reposer d’autres mais on a besoin d’expérience collective. Je pense que ce n’est pas en tournant tout le temps, toutes les semaines, différemment que par le passé, qu’on va se développer et s’améliorer, je pense qu’on a besoin de passer du temps ensemble. Là, ce que je dis est encore plus vrai, quand je donne le maillot, s’ils sont bons, ils enchaînent et ils ont besoin d’enchaîner. C’est vrai qu’il y a des joueurs qui ont pas mal matché depuis le début mais c’est parce qu’ils sont parmi les meilleurs et je pousse à continuer dans ça aujourd’hui. Mais il est sûr qu’il faudra voir certains joueurs et je crois qu’il faut savoir aussi qu’il y a des joueurs qui ont besoin de ce temps d’adaptation car ils ont été recrutés à des niveaux inférieurs et ils ont besoin d’emmagasiner de l’expérience à l’entraînement et les pousser à me montrer que je peux les mettre. Il y aura de la place pour tout le monde dans le prochain bloc qui va arriver donc ce sera peut-être un peu plus vrai dans le prochain.
Quel est ton regard sur cette équipe de Narbonne qui a eu beaucoup de départs mais qui a fait monter pas mal de jeunes des espoirs et qui a fait un recrutement qualitatif ? C’est une équipe beaucoup plus redoutable que ce que l’on pourrait penser sur le papier par rapport à quand ils sont descendus il y a quelques mois ?
J’ai un peu suivi vu qu’ils avaient eu quelques changements mais il y a quand même beaucoup de joueurs qui étaient déjà en interne donc ils ont peut-être l’habitude de jouer entre eux. C’est bien, ils font un bon début de saison, on sait que ce sera un gros match au Stadium mais la Nationale, c’est des gros matchs tous les week-end donc c’est à nous d’élever notre niveau.
C’est peut-être aussi le match qui peut vous réconcilier avec les supporters ?
On n’est pas fâché ni guéguerre avec les supporters, rien de tout ça. Je vous l’ai dit dès le début, c’est à nous de donner aux supporters l’envie de nous suivre, c’est à nous d’être bons et généreux et quand on aura fait tout ça, on pourra peut-être dire des choses. Aujourd’hui, le seul truc que je demande, c’est du monde au stade mais c’est d’abord à nous de faire les efforts et ensuite à eux. Moi, je remercie les gens qui sont là parce qu’il y en a qui poussent vraiment derrière l’équipe et on ne peut pas mettre tout le monde dans le même sac. On n’est pas du tout fâché avec notre public, au contraire, on a fait qu’un match ici depuis la demi-finale de l’année dernière et c’est justement à nous d’être généreux, de montrer un beau visage de nous et c’est important. Quand on aura donné ça, on pourra quémander ou demander des choses mais, avant ça, c’est d’abord à nous d’être généreux.
Si on prend l’exemple de Narbonne qui redescend de Pro D2, ils font deux fois 4 000 personnes à la maison, ils font plus de monde en Nationale que quand ils ont fini en Pro D2. Il pourrait y avoir une désaffection naturelle mais c’est le contraire donc tu te dis qu’il y a quand même peut-être des choses à faire localement à Albi pour attirer du monde ?
Ton exemple est le bon, je vois aussi des clubs qui ont connu le haut niveau comme Bourgoin qui font comble. Sans parler de combler le stade, je me dis qu’on est capable de faire 3 000 / 4 000 tous les week-end. Quelles solutions on a ? Je ne sais pas, je sais qu’on a un DG qui travaille là-dessus avec le team manager qui gère maintenant le stade depuis quelques semaines pour faire bouger les choses car je pense qu’il y a quelque chose à créer, c’est vrai, je le pense. Il faut peut-être mettre une boîte à idées au stade où les gens déposeraient leurs idées mais je suis convaincu qu’on peut être comme ces clubs-là. Après, Narbonne est réputé pour être une terre de rugby, un club historique, idem pour Bourgoin mais je crois qu’on a aussi notre carte à jouer à Albi. Ca fait maintenant un an que je suis ici et c’est vrai que je suis surpris par le nombre de supporters, on me dit que c’est normal mais j’écoute juste et je me pose la question. Il y a les performances de l’équipe, oui, c’est vrai mais, si je prends l’exemple concret de l’année dernière où on a quand même occupé la 2e ou 3e place voire la 4e pratiquement tout le long de la saison, le stade était le même. Donc je me demande pourquoi c’est comme ça, qu’est-ce qu’il se passe, qu’est-ce qu’il ne se passe pas, est-ce que c’est parfois un passé qui a été lourd à supporter et que les mecs en ont un peu ras-le-bol ? Je ne sais pas mais quand on est supporter d’une équipe, et tu viens de le dire avec Narbonne qui est descendu mais qui a du monde au stade … Est-ce qu’il faut que le club évolue ? En tous cas, il est quand même important qu’on se mette autour de la table pour trouver des solutions et moi, en tous cas, je pousse pour qu’on se mette autour de la table et qu’on crée quelque chose. S’il y a des jeunes, ou des gens plus ou moins âgés, peu importe, et on en a discuté avec le club, il faut qu’on lance un KOP des supporters comme certains clubs le font ou des supporters avec notre amicale des bénévoles qui est sensationnelle et qui suit tous les matchs et peut-être qu’avec les deux, on peut s’aider et créer des choses. Je pense vraiment qu’il faut se mettre autour de la table et se poser la vraie question cette année et même pour l’avenir du club. Oui, le rugby est une chose mais je pense qu’on peut se mettre autour de la table pour trouver une solution et aujourd’hui, à Albi, je suis peut-être un peu gourmand en disant 4 000, je crois qu’on doit pouvoir faire 3 000 à tous les matchs. Et puis, tout le monde autour en a besoin, nous, le sportif, les gens d’à côté, les partenaires, etc, il y a une mise en place des après-matchs, on va professionnaliser la guinguette des joueurs qui est sensationnelle. Il va peut-être y avoir de la restauration, je sais qu’il y en a déjà avec le Comité d’Animations et c’est top car il y a donc des moyens pour manger. Aujourd’hui, il faut que l’on crée quelque chose pour faire venir les gens au stade, c’est vital.
On sait que dans ton éducation castraise et du haut niveau, tu es adepte d’une communication maîtrisée. Pour mettre un peu d’allant, il te faudrait peut-être fendre un peu plus l’armure ?
C’est possible aussi, peut-être que ma communication est trop neutre et qu’il n’y a pas assez d’allant. Mais le sportif passe avant tout et je crois qu’aujourd’hui, avec les changements qu’il y a depuis qu’on est arrivé, il faut quand même être très précautionneux de où on sera à la fin de la saison donc je ne veux pas m’avancer plus que cela et on connaît l’objectif. Alors oui, peut-être qu’avec une communication plus » tapageuse « , ai-je envie de dire, plus » punchline » …
La communication, ce n’est pas d’abord juste sur le terrain ?
Oui mais c’est ce que je dis au tout départ, la première, c’est celle-là. La 2e est quand même de créer des événements autour et aujourd’hui, je suis convaincu que, que ce soit dans les grands clubs ou dans les clubs un peu en-dessous, il y a quand même dans tous les stades jusqu’à la Fédérale 1 de l’animation. Si tu ne crées pas de l’animation, le mec ne vient pas que pour 80 minutes, c’est une vérité. Tu me parles de Castres mais, à l’époque, le stade n’était pas complètement plein, il l’a été car l’équipe a donné et a été généreuse mais s’il l’est aujourd’hui, c’est parce qu’il y a une animation avant, pendant et après qui est quand même sensationnelle, le mec qui veut amener ses enfants peut le faire. Donc, il faut se mettre autour d’une table et voir ce que l’on peut faire, aussi avec nos moyens et voir ce qu’on peut amener comme animation mais il est certain qu’il faut amener de la vie au stade. Et moi, j’aimerai qu’on arrive également à créer ce KOP des supporters qui s’associe au comité des animations, je le dis là mais s’il y en a qui veulent venir rejoindre ça, on va trouver des solutions pour les inviter aux matchs. Il faut que l’on fasse un truc un peu différent et puis, on est quand même une terre de rugby ici.
Le nerf de la guerre est peut-être aussi d’attirer les jeunes ?
Bien sûr que c’est aussi ça, tout le monde est important mais il est certain qu’on sait très bien l’énergie que peut mettre un KOP de supporters jeunes. En tous cas, je remercie tous les gens qui viennent au stade, même un peu plus âgés car ils mettent une énergie de dingue mais ils sont un peu tout seuls.
Le mot d’ordre pour ce match face à Narbonne ?
Sérieux et constance pendant 80 minutes. C’est important et on en a besoin, on a besoin de constance.
Propos recueillis par Loïc Colombié
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