#Rugby – Nationale / A.Méla (Albi) : «C’est une chance de pouvoir jouer un match pendant 80 minutes!»

Arnaud Méla, le manager du Sporting Club Albigeois après un week-end de repos forcé, à cause d’une épidémie de Covid19 au sein du club Tarnais, nous a accordé un entretien pour faire un bilan à l’aube du déplacement à Suresnes. De la gestion du Covid 19, en passant par les contraintes liées au couvre feu ou encore l’analyse de ce début de championnat et le report du match face à Cognac, l’ex seconde ligne international nous a fait un tour d’horizon de l’actualité jaune et noire. Mais bien entendu l’originaire du plateau de Lannemezan nous a livré son analyse du futur adversaire du SCA, la surprenante et joueuse équipe de Suresnes, actuelle 3 eme de Nationale. Touché de plein fouet par le contexte sanitaire et les intempéries, le Coach albigeois et le club de la cité épiscopale reviennent à des notions simples : celles de savourer et d’apprécier la chance de pratiquer le rugby dans ces périodes troubles pour le sport français.

Arnaud, où en est-on de l’épidémie de Covid-19 au SCA ? 

 

On est en train de plutôt bien la gérer, on avait quasiment tout le monde sur le front lundi. On avait refait un test le matin et on attend les résultats mais, normalement, les voyants sont au vert. On a laissé deux personnes chez elles, par précaution aussi, parce qu’elles n’étaient pas en forme et ne se sentaient pas encore prêtes mais 95% des joueurs sont prêts à jouer ce week-end. 

 

On entendait le Castre Olympique, qui a la même problématique que le Sporting Club Albigeois, dire  » le seul avantage a avoir eu plusieurs vagues d’épidémie du Covid, c’est qu’à un moment donné, tous les joueurs ont été infectés et qu’on en sera débarrassé pour quelques temps « . Tu corrobores ? 

 

Si on nous avait donné ça comme solution, peut-être que nous aurions fait une réunion au mois d’Août et on aurait donné le Covid à tout le monde mais ce ne sont pas des solutions à adopter. Il est vrai que, sur les deux épidémies que nous avons eues, on a quand même contaminé presque la moitié de l’effectif donc, on s’enlève des chances d’être pénalisés à nouveau. Il faut quand même que l’on reste vigilant parce qu’on voit que ça va très vite, on s’est fait déborder sur une semaine de vacances. Heureusement que c’était une semaine de vacances parce-que si ça avait été une semaine d’entraînement, je pense qu’on aurait peut-être fait la totalité de l’effectif. Donc, il faut rester vigilant, continuer à garder un maximum de distances, j’ai supprimé les séances vidéos et le temps passé en salle. On fonctionne avec des vidéos que l’on donne sur le groupe des joueurs où ils peuvent tous les jours ou tous les soirs regarder des montages. On va fonctionner comme ça et on fera le point après mais aujourd’hui, nous allons éviter les regroupements. 

 

Malheureusement, on sait qu’il y eu des joueurs symptomatiques cette fois-ci et que ce sont des joueurs qui mettent beaucoup plus de temps à revenir que les asymptomatiques. Ca va être une grosse donnée du problème ? 

 

Lundi, on leur a mis les GPS et on a fait une grosse séance pour faire le point à peu près sur tous les joueurs. Franchement, nous avons été agréablement surpris, il y a eu beaucoup d’intensité, de rythme de course et de vitesse. Nous avons un ou deux joueurs qui sont un peu en-dedans des performances que l’on pouvait attendre, mais je trouve que les joueurs ont quand même pas mal récupéré. On leur a quand même laissé plus de temps prévu mais, ils avaient plutôt plus les jambes lourdes de ne pas avoir fait d’activité pendant 10 jours que des soucis de respiration. On a eu un ou deux joueurs un peu en-dedans, on va voir, on va se laisser 2/3 jours pour faire le point. 

 

Pendant ce temps, le championnat a continué à faire son petit bonhomme de chemin. Tu as pu regarder et analyser les résultats avec un œil extérieur, vraiment focus sur cette 5e journée de Nationale. Qu’est-ce que tu en as pensé ? J’imagine que le carton plein de Nice a dû un peu t’interpeller ? 

 

Nice joue tous leurs matches, ils gagnent des matches, ils prennent des points, ils avancent. On avait fait match nul chez eux, finalement, c’était un bon match nul parce qu’on se rend compte que c’est une équipe qui va être sur le haut du tableau. Ils ont aussi l’effectif pour donc oui, quand même surpris qu’ils aillent mettre autant à Aubenas surtout que ce n’est quand même pas simple d’aller s’imposer en Ardèche. Il est sûr qu’ils ont mis un gros carton, ils ont passé un signal fort donc c’est une équipe à suivre. Après, je n’ai pas vu tous les matches mais on en a vu quelques-uns, on a aussi vu un Dax / Tarbes de haut-niveau, vraiment un match avec beaucoup d’intensité et des Tarbais que je ne pensais pas voir à ce niveau, ni prêts si tôt. Il y a d’autres résultats comme Bourg-en-Bresse qui sont passés près chez eux, je n’ai pas vu le match mais parfois, tu peux mener de 12 points tout le match, prendre un essai à la 80e et tu te retrouves avec un score serré. Les gens pensent que tu as failli perdre même si tu as maîtrisé ton match, mais en tous cas, le score est serré et je suis surpris que Bourg ait eu du mal chez eux contre Chambéry. 

 

Un des gros problèmes du Sporting pour s’étalonner par rapport aux autres, ce sont ces deux matches de retard, un pour cause d’intempéries face à Bourgoin et celui de ce week-end contre Cognac. Est-ce qu’on sait quand sera rejoué ce match contre Cognac ? On sait que celui de Bourgoin le sera le 18 Avril mais quid de celui contre Cognac ? 

 

On est parti pour le rejouer le week-end du 22 Novembre, on est tombé d’accord avec Cognac. Nous, nous allons devoir enchaîner un bloc de 9 matches mais comme il nous en manque deux aussi … Il est sûr que ça va être dur pour les joueurs, il faudra bien gérer le groupe et l’état de santé. Il va falloir que l’on fasse tourner et que l’on cible un peu des matches aussi parce qu’il est certain qu’on ne pourra pas tout jouer à fond. Sur neuf matches d’affilée, on ne va pas mettre des joueurs titulaires neuf fois de suite mais nous n’avions pas le choix, il fallait que l’on prenne une décision. C’était soit là soit au mois de Mars mais, en Mars, ça nous faisait enchaîner un bloc de 12 donc nous avons choisi le plus accessible et celui qui était le plus proche. On part sur une grosse série. 

 

Le côté positif, quand on regarde le classement, c’est que le Sporting avec deux matches en moins, est caché à la 8e place, ce qui n’est pas obligatoirement sa place réelle. Ce n’est pas mal non plus parce-que ça permet d’enlever une certaine pression ? 

 

Je préférerai être premier en ayant joué tous mes matches et sans avoir de soucis à gérer autre que le rugby. Mais, ce qu’on a fait jusqu’à maintenant n’est pas mauvais et il faut que l’on continue à avancer et qu’on aille chercher des points à l’extérieur tous les week-ends. On se déplace beaucoup donc, il faut que l’on continue à bosser et à grappiller des points pour pouvoir, rester bien placés et bien classés au britannique parce-que c’est aussi ce classement qui compte. Aujourd’hui, nous ne sommes pas trop mal placés donc, il faut continuer à grappiller des points pour pouvoir s’approcher du classement de tête au moins à Noël. 

 

Parlons de l’équipe de Suresnes, l’équipe un peu surprise de ce début de saison. Ils viennent d’enchaîner trois rencontres de haut-niveau avec une victoire à l’extérieur à Blagnac, deux victoires à domicile contre Narbonne et Dijon. Personne n’attendait cette équipe à ce niveau-là ? 

 

C’est une équipe qui joue sans pression, personne n’avait trop parlé d’eux. On le voit, ils jouent des ballons de partout, ils tentent des coups de loin, ils sont capables de jouer 5 temps de jeu à 5 mètres de leur ligne, ils s’en foutent. Franchement, ça paye, on voit un état d’esprit qui est bon mais il y a aussi beaucoup de densité physique, une grosse conquête en mêlée, j’ai redit aux joueurs que je pensais que c’était la plus grosse mêlée de la poule avec des joueurs très costauds. Donc oui, c’est une équipe très complète avec vraiment une volonté de jouer au rugby, il va falloir que l’on soit prêt pour pouvoir aller relever le défi parce qu’il est sûr qu’eux le seront. Si on fait un match indiscipliné et que l’on ne met pas tout ce qu’on a, ça va être très compliqué de ramener un point de là-bas. 

 

Est-ce qu’il y a des individualités à surveiller dans cette équipe de Suresnes ? 

 

Oui, bien sûr. Ils ont 2 / 3 joueurs qui sont pénétrants surtout leur 8, Abdel Fofana, qui est un jeune que je connais, qui est passé par Brive et aussi par Valence d’Agen.  Il est en grande forme, il gagne beaucoup de duels, c’est un joueur qui les met quand même en permanence dans l’avancée. Ils ont aussi derrière des ailiers qui vont très vite, qui sont connectés, ils ne restent pas sur leur aile, ils sont toujours connectés autour du 10, du 12 ou du 13 donc, il y a des solutions au moindre passage de bras. C’est une équipe qui est agréable à voir jouer et surprenante parce qu’ils jouent un rugby pas tout à fait adapté pour leurs physiques et leurs gabarits, avec une équipe très costaud et très lourde. Ils se font des passes, ils jouent au rugby et il va falloir que l’on soit prêt pour relever le défi.

 

Par contre, l’un des défauts de la cuirasse de Suresnes est peut-être la défense. On le voit souvent dans les matches que jouent Suresnes, il y a beaucoup de points d’un côté comme de l’autre. Ca peut être l’un des talons d’Achille de cette équipe ? 

 

Après, tu t’exposes. C’est une équipe qui joue sans pression donc qui, comme je l’ai dit, jouent des coups de loin, qui vont jouer des sous-nombres. Si tu es en place défensivement et que ce jour-là, ça ne veut pas trop sourire pour eux, il y a des contres à jouer. Sur les essais qu’ils ont pris, on a vu qu’ils prenaient un peu des essais casquettes parce-que parfois, ils font aussi la passe de trop. La discipline, notre défense, notre organisation seront très importantes. 

 

Un staff composé de Compan, Blin, Rabadan qui sont des gens de ta génération. Qu’est-ce que tu penses de leur philosophie de jeu ? Tu reconnais les joueurs qu’ils étaient sur le terrain en tant que coaches ? 

 

Mathieu était un joueur qui aimait jouer au rugby et qui aimait faire la passe de plus. On le voit dans la philosophie qu’ils ont qui est la sienne, c’est un mec qui véhicule des valeurs de jeu. Pierre, que je connais encore plus, est aussi de ma génération et pareil, c’est un mec qui aimait jouer au rugby, il préférait les grands matches de rugby que de venir jouer chez nous, à Brive, dans la boue. Ce sont des joueurs qui aimaient ça et on le voit, la philosophie de cette équipe colle à la philosophie des entraîneurs. 

 

On va aussi parler un peu intendance puisque c’est l’un des sujets du moment. Avec le couvre-feu en Ile-de-France, comment se débrouille le Sporting Club Albigeois pour passer entre les gouttes ? Vous avez une dérogation pour pouvoir repartir dans les temps où il va falloir que vous vous adaptiez au couvre-feu ? 

 

On va demander une dérogation pour pouvoir repartir, ça, c’est sûr. On avait un souci pour manger à l’hôtel la veille, il faut que l’on mange un peu plus tôt pour qu’ils puissent se libérer avant 21 heures. On va s’organiser mais par contre, nous allons demander une dérogation pour pouvoir repartir après le match mais, comme on joue assez tôt, je pense que nous serons dans les clous. 

 

Le risque qu’il y ait un couvre-feu ici à Albi, d’ici quelques jours ou quelques semaines, est quelque chose qui t’inquiète beaucoup ? 

 

Ça ne nous inquiète pas sur la situation pour pouvoir s’entraîner puisqu’on s’entraîne sur la journée. Par contre, sur l’organisation des après-matches, je ne sais pas comment on va gérer le cas, on va voir avec Jean-Jacques (Veyrac) comment gérer tout cela. Il est sûr que cela serait pénalisant pour nous, des après-matches sans partenaire, c’est difficilement vivable pour des clubs. A l’occasion, sur un match, c’est faisable mais on ne pourra pas tenir comme ça deux mois. Donc, il faudra s’adapter, je ne sais pas, peut-être que l’on jouera plus tôt aussi si jamais c’est trop compliqué. 

 

On va finir par une question un peu plus historique et sociétale. Le Stade Jean-Moulin se trouve sur le Mont Valérien, haut monument de la résistance française. C’est un levier que tu peux activer auprès de tes joueurs en disant  » là, on va quelque part où une partie de l’histoire de France s’est passée, il y a certaines choses qui en transpirent  » ? Est-ce que c’est quelque chose qui te parle à toi ? 

 

Je ne sais pas si je vais m’appuyer là-dessus, aujourd’hui, on ne joue pas au rugby, on n’a joué que trois matches. Ce que je vais dire aux joueurs, c’est que c’est une chance de pouvoir jouer un match pendant 80 minutes et que donc, c’est prendre du plaisir et se lâcher sur un terrain. On voit que l’on travaille dur à l’entraînement mais finalement, en ne jouant pas, on ne se récompense pas donc, le peu de match que l’on peut jouer, il faut vraiment tout lâcher et se régaler. Ce n’est qu’un match de rugby, il y a des choses plus graves dans la vie mais c’est trop important aujourd’hui. Quand je vois Clermont / Stade Français et le journaliste qui, à la mi-temps, demande à Bézy comment ça allait physiquement, le mec a répondu  » mais on est trop content de jouer ! « . On s’entraîne, on est payé pour jouer au rugby et on ne joue pas de matches donc, la motivation doit déjà être toute faîte. On fera des choses assez simples mais j’espère qu’en tous cas, on sera prêt pour prendre du plaisir et faire un grand match là-bas. 

Propos recueillis par Loïc Colombié

https://hearthis.at/radio.albiges/magsport-20-octobre-2020/

Retrouvez l’intégralité de l’itw d’Arnaud Méla lors de l’émission « Le #MagSport – RadioAlbiges  » du 20 octobre 2020

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