En amont du match entre Graulhet et Nîmes ce dimanche , le président Gardois Steeve Calligaro, nous a fait un tour d’horizon de l’actualité du Rugby Club Nîmois. Du développement du RCN, en passant par la formation ou encore la sociologie du club, l’homme fort des taureaux Nimois nous a dressé l’état des lieux du club tout en donnant son avis tranchée sur l’actualité nationale autour de la FFR. Pour celui qui dirige Nîmes depuis quasiment deux ans, malgré la différence budgétaire avec Graulhet, ses hommes auront fort à faire face aux mégissiers.

Nîmes est l’un des clubs de Nationale, et déjà avant en Fédérale 1, qui est en train de monter et de se structurer et cette année en est un peu l’apanage ?
C’est un club qui subit un nouvel essor depuis deux ans et une nouvelle présidence. On a réuni pas mal d’acteurs économiques et sportifs autour du club et, effectivement, pour l’instant, ça se passe plutôt pas mal, on structure pour, un jour, avoir peut-être les moyens de viser un petit peu plus haut. Ça travaille (sourire).

L’un des marqueurs de Nîmes l’année dernière était aussi d’avoir 90% de joueurs JIFF ?
Tout à fait. On a toujours eu une bonne formation sur Nîmes, des Crabos, Alamercery et autres, on a » re-parié » sur la formation il y a quelques années en recrutant un directeur sportif, un responsable de la formation, etc. C’est toute une filière qui, en effet, permet à la fois d’alimenter l’équipe première mais aussi d’avoir un club qui pèse sur la localité. Nîmes est la 18e agglomération de France et c’est important que le club de rugby soit dans sa ville et sa localité.

Comme beaucoup de clubs, Nîmes a un pied dans la pluriactivité et un autre dans le semi-professionnalisme ou le professionnalisme ?
C’est ça puisqu’aujourd’hui, sur 38 joueurs, on a 14 pros exclusifs, le reste étant des joueurs pluriactifs. On a quand même réussi cette année à alourdir la charge de travail avec des blocs tant le matin qu’entre midi et deux permettant aux joueurs pros comme aux pluriactifs d’avoir le maximum de temps ensemble. Effectivement, le pari pour des clubs comme nous est d’arriver à avoir de la cohérence et de l’osmose dans un groupe où il y a des gens qui s’entraînent soir et matin et des gens qui ne s’entraînent que le soir. En fait, d’avoir de la cohésion est le pari qui est fait chaque année dans un groupe où il y a des statuts un peu différents mais je pense que c’est le lot commun de pas mal de clubs à notre niveau et ça va le rester car, quand bien même nous monterions un jour en Nationale, l’objectif n’est pas du tout d’avoir un effectif 100% pro. Je pense que ce n’est pas l’objectif et aujourd’hui, par exemple, notre capitaine et 3e ligne Benjamin Barnerias est commercial avec la possibilité de se sortir des temps d’entraînement très cohérents qui sont quasiment les mêmes que les pros et d’organiser son travail sur le reste de la journée. Ça, c’est quand même un modèle qui permet un équilibre vie perso / vie rugbystique / vie professionnelle aux joueurs, qui leur permet d’être bien dans leurs têtes et de construire leur avenir car, on est somme toute en Nationale 2 mais qu’en Nationale 2. Du coup, la pluriactivité et la préparation de l’avenir restent quand même importantes pour nos joueurs.

Vous êtes un peu sur le même modèle que ce que fait Blagnac en Nationale ?
En Nationale, j’ai compris que Blagnac était une exception et que c’est quand même compliqué mais bon, ce n’est pas parce-que c’est compliqué qu’on ne doive pas tenter d’y rester. On est évidemment en train de parler recrutements et renouvellements de joueurs pour l’année prochaine où je pense qu’on aura une vingtaine de pros et une quinzaine de pluriactifs. Ça sera probablement la proportion pour les 3 prochaines années.

Vous avez fait une belle saison l’année dernière et vous avez continué avec ce groupe en amenant une touche de nouveauté, entre autres le manager Guillaume Aguilar ?
On a réussi ce que l’on souhaitait faire à savoir garder la dynamique de l’année dernière et garder la quasi-totalité de nos joueurs titulaires. On a réussi à le faire et on a réussi à bien recruter sans dénaturer notre groupe et avec un recrutement assez ciblé, un N°9 très fort, un N°10 tout en gardant l’ossature du groupe de l’année dernière et la bonne préparation. Tout s’est plutôt bien passé cette année ce qui explique ce bon début de saison même si on a eu un mois de Décembre difficile. Il y a eu une bonne préparation, un bon recrutement ciblé et on a eu la chance, ou le talent, je n’en sais rien, de recruter aussi des états d’esprit qui se sont adaptés au groupe et qui ne sont pas arrivés comme des éléments supplémentaires un petit peu loin de l’identité, on est un club et on essaye d’avoir un ADN commun. On a donc des recrues qui nous ont apporté de la valeur ajoutée en termes de rugby mais aussi en termes de personnalités, on a des bonhommes. Tout ça est animé par Guillaume Aguilar, manager général de Mâcon trois ans après avoir été le capitaine que l’on connaît avec Mâcon, champion de France entre autres. On a recruté Guillaume Aguilar, ce qui était une étape dans notre plan de marche, notamment d’avoir un manager pro car Guillaume est là 24/24 ce qui permet d’entraîner sur des blocs temps, d’avoir des entretiens individuels, les préparations de matchs … Ça nous fait évidemment franchir un niveau, d’abord parce-que c’est quelqu’un de très compétent et d’humain, c’est quelqu’un d’impliqué parce-que c’est son travail, il ne fait » que ça » toute la journée. C’est donc vraiment quelqu’un qui nous fait franchir un cap cette année, on le voit, on le sent, les joueurs le reconnaissent. Ce n’est pas le côté professionnel qui fait la compétence mais quand on a quelqu’un de compétent qui peut se consacrer à 100% à sa tâche, c’est quand même une très, très forte valeur ajoutée.

Pour le moment, vous êtes seconds de la poule 1 de Nationale 2 et j’imagine que vous êtes quasi satisfaits des résultats sportifs. Si d’aventure vous alliez jusqu’à la Nationale, est-ce que vous accepteriez la montée ?
(rires). On a eu un superbe début de saison et puis quelques blessures en Novembre qui ont un peu grippé la machine avec 2 / 3 défaites et quelques matchs en retard, on doit être 2e ou 3e aujourd’hui avec 2 matchs en retard. On a touché du doigt qu’effectivement, c’était plus dur quand on avait 4 ou 5 blessés et puis, il y a aussi des équipes qui n’avaient pas fait notre bon début de saison mais qui se sont mis à quand même bien marcher sur les mois de Novembre / Décembre et donc, on voit un niveau beaucoup plus homogène qu’il ne pouvait y laisser paraître sur le mois d’Octobre. On fait aujourd’hui partie d’un groupe de 4 / 5 équipes qui sont au-dessus de la poule mais, franchement, je ne vois pas de cassure au niveau de la poule. Pour répondre à votre question, si jamais on monte, c’est à dire si jamais on est finaliste puisque ce sont les finalistes qui monteront cette année alors qu’il n’y aura vraisemblablement plus qu’une montée dans les années futures, oui, on se prépare à monter le cas échéant à la fin de la saison. Ce serait un petit » accident » car ce n’est pas ce qu’on a prévu, on a prévu de monter à la fin de la saison prochaine et non pas à la fin de celle en cours, notre plan de marche était sur trois ans, j’ai pris la présidence il y a un an et demi donc ça nous amène à avoir une équipe prête pour la montée l’année prochaine. Mais si on devait avancer et avoir la chance de monter cette année, on est en train de préparer et financièrement et en termes de joueurs la possibilité de tenter d’être compétitif. On le voit quand même, cette réforme et la création de la poule Nationale puis celle de la Nationale 2 a pour effet d’augmenter le niveau, on voit des clubs comme Rennes et Cognac-Saint Jean d’Angély qui sont à la peine en Nationale mais on voit surtout ce club de Hyères-Carqueiranne La Crau qui » a marché sur tout le monde » l’année dernière avec seulement 2 défaites sur l’ensemble de la saison, qui est 3e en partant de la fin, avant avant-dernier. Cette catégorie Nationale fait très peur, on a l’ambition d’y monter mais on ne sait pas si on est assez solide et, en tous cas, une année de plus de préparation ne serait pas mauvaise. Mais encore une fois, si le sportif nous y amène plus rapidement, on fera tout pour assumer.

Parlons de votre secteur, celui de la finance et des chiffres. Quel est le budget du RCN et combien y a-t-il d’employés ?
On va boucler le budget cette année à 2M2. Je n’apprends rien à vos lecteurs, la question budgétaire est importante mais la 2e question très importante est la part de ce budget dédiée à l’école de rugby, à la formation et à l’équipe première. Ce n’est pas tout à fait pareil d’avoir 2M de budget et de mettre 1M sur l’équipe première que d’avoir 2M et de mettre 1M5 sur l’équipe première et de n’avoir que des équipes en entente sur la formation. Donc le budget est important, on l’a fait progresser de manière considérable sur les deux dernières années avec notamment un secteur de partenariats privés que l’on structure comme un club entreprises. On est plutôt sur un format de réussite sur les deux dernières années à ce niveau-là ce qui nous permet aussi de pouvoir structurer le secteur médical, le secteur formation et l’ensemble des secteurs qui font tourner le club. Tous nos joueurs sont sous contrats sauf 5 / 6 espoirs qui sont juste défrayés sinon la totalité des gens sont sous contrats, que ce soit du pluriactif ou de l’exclusif, du professionnel et dans les bureaux, sur la partie administrative, on a 13 collaborateurs, En ce qui concerne la structuration, on dépose ce printemps les statuts d’une SAS à objectif sportif, là-aussi, c’est une structuration, la possibilité de lever de l’argent, une SAS et une association est un outil normal quand on essaye de structurer un club et de passer un échelon supplémentaire. Ça fait partie de la feuille de route de développement et on dépose également en Mars les statuts d’un organisme de formation qui va également nous permettre d’avoir une corde de plus à notre arc, tant sur le développement économique car cela voudra dire que l’on peut vendre de la formation que sur le secteur du recrutement et de la gestion de l’équipe espoir et de l’équipe première car dès la saison prochaine, en Septembre, on va ouvrir une classe de BPJEPS. On va donc former nos propres joueurs sur des doubles parcours diplômants et rugby, tout le monde voit bien le montage, ça baisse le reste à charges du coût du joueur pour le club, ca lui permet à lui d’avoir un double parcours et ça permet à des joueurs pros d’avoir quand même une qualification et un diplôme à la fin du parcours. Et puis, un organisme de formation est un centre de profits, quand vous prenez un prof, vous lui faîtes faire de la formation et il reste un résultat dans cette entreprise qui bénéficiera de l’essor du club. C’est un certain nombre d’actions qui doivent permettre au club de se structurer car on ne structure pas un club en mettant de l’argent sur l’équipe première, je ne le crois pas et le comité directeur est convaincu du contraire. En structurant le secteur commercial, la formation, le secteur médical, la communication, le marketing, etc, à un moment donné de budget et de bon travail, on a de quoi mettre sur l’équipe première et monter. C’est dans ce sens-là qu’il faut voir le développement d’un club, en tous cas, c’est dans ce sens-là que nous, nous voyons le développement de notre club. On se structure donc par avance et, à un moment donné, on aura l’équipe qui nous permettra de monter mais ce sera la conséquence d’une structuration de club et pas le contraire.

Un œil sur l’adversaire du week-end, le Sporting Club Grauhetois ?
Pour moi, jeune président que je suis, quand je vais à Graulhet, c’est avant tout l’histoire du rugby mais ça n’a rien de péjoratif, ce sont des clubs historiques, des noms qui sont ressortis. Au comité directeur, nous avons Bernard Viviès qui portait dans son cœur Mr Guy Laporte et ce sont des clubs que l’on respecte car ils ont fait l’histoire de notre sport. Sur l’actualité, ça correspond à ce que je lis, y compris les supporters de Graulhet à savoir que tout le monde voyait le petit poucet et c’était même à peine respectueux parce qu’on compare les budgets et l’année dernière. C’est une très belle histoire car ça prouve qu’avec de bonnes recettes, avec l’amour du maillot et une gestion intelligente de l’équipe première, aujourd’hui, vous » ne faites pas rigoler « , vous êtes aux portes des 6 premiers de la poule et là où on vous voyait batailler pour le maintien, beaucoup de gens maintenant vous voient dans les 6 premiers et vous qualifier. On y va donc avec beaucoup de respect, vous n’avez pas perdu à domicile depuis le début de la saison contrairement à nous contre Aubenas. Il n’y a pas Nîmes avec beaucoup d’argent et Graulhet, le tout petit club qui lutte pour le maintien, ça, c’est l’image d’Epinal, on va à Graulhet avec beaucoup de respect et sur une période, je dois vous le dire sans qu’il y ait manipulation, où nous sommes affaiblis. Avant de gagner Mâcon à la maison de seulement 4 points avec une victoire qui s’est dessinée à la dernière minute, nous étions sur une série de trois défaites d’affilée donc on est dans le dur. On est vraiment dans le dur après un superbe début de saison, on est dans le dur parce-que plusieurs blessés, on a une équipe avec des joueurs que l’on fait tourner mais dès lors que l’on a un ou deux blessés aux postes, ce n’est pas le même rendement. Notre capitaine, Benjamin Barnerias, est absent depuis deux mois, Charles Robbe, l’un de nos centres les plus puissants, s’est fait les croisés et on l’a perdu, notre super piler Revazi Tsiklauri, qui venait de Suresnes, a une déchirure et ne reprend que dans 15 jours. On est dans le dur et on sera content si on ramène quelque chose de Graulhet mais à voir les matchs de Graulhet à domicile depuis le début de la saison, on ne se fait pas beaucoup d’illusions.

On connaît votre proximité avec Patrick Buisson qui vient de ne pas être élu président délégué pour quelques voix, 51.49 % contre 48.51%. On a appris vendredi que Bernard Laporte démissionnait de la présidence de la Fédération Française de Rugby et qu’il y allait avoir un congrès au cœur du mois de Juin. Que pensez-vous de cette situation et du devenir du rugby français dans une situation telle ?
Au-delà des personnes, je trouve sincèrement qu’on se footballise avec tout ce qu’il y a de péjoratif dans la manière où je le prononce. Le football est un superbe sport mais il y a trop d’intérêts aujourd’hui et ça rend les gens un petit peu dingues. Je pensais que nous étions à l’abri de ça encore pour quelques années mais je constate que ça n’est pas le cas. Tout le monde a l’air de dire que ce sont des postes bénévoles, j’y crois assez peu à voir la frénésie que ça crée. Je me suis déjà exprimé, ça n’était pas une année d’élections car des élections étaient prévues l’année prochaine, c’était une année où, malgré les déboires de Bernard Laporte, il fallait jouer collectif et il fallait jouer la continuité et l’apaisement. Le calife se voyant vizir à la place du vizir, il faut absolument tout casser et refaire des élections à 5 mois de la Coupe du Monde, je pense que c’est une erreur. On va vraisemblablement vers des élections qui ne vont pas avoir pour effet de nous permettre de nous concentrer sur la Coupe du Monde, sur l’équipe de France et sur le fait de capitaliser dans nos clubs sur les retombées de cette Coupe du Monde, ce qui est la priorité des priorités cette année. Après, quel président demain ? Vraisemblablement Florian Grill est très bien placé, il y aura probablement une liste en face mais en fait, peu importante. On se bat tous les jours dans les clubs pour essayer de propager la pratique du rugby, pour essayer de garder cette merveilleuse image que notre sport véhicule, on sait qu’une Coupe du Monde en France doit permettre d’éclairer notre sport, de gagner des licenciés entre autres choses. Dans les clubs, on se prépare tous à essayer de gérer le mieux possible cette Coupe du Monde et d’autres se battent pour avoir le sceptre et pour être président de la Fédé le jour de la Coupe du Monde. Je crois que c’est bien loin des intérêts de notre sport, je ne vais pas faire de philosophie mais les hommes étant ainsi, assez peu raisonnables en étant à deux doigts de prendre le pouvoir que je pense effectivement que ces luttes-là ne servent pas le rugby mais simplement l’intérêt de quelques-uns.

Merci pour ce point d’étape du Rugby Club Nîmois et de l’actualité du rugby français
Merci beaucoup.
Propos recueillis par Loïc Colombié

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