Jean-Maurice Decubber,le flanker de Massy, est un homme heureux car il va découvrir pour la première fois de sa carrière la Pro D2. Après la victoire aboutie face à Albi (40–10), le 3eme ligne des franciliens a décliné les sensations et les émotions qui l’ont assailli après cette apothéose qui marquera son parcours de rugbyman. Ce serial plaqueur arrivé de Cognac à l’intersaison avec l’ambition de jouer le haut de tableau en Essonne, ne pensait pas à l’aube de la saison vivre une année aussi exceptionnelle . Entretien avec un joueur qui veut ramener le bouclier de champion de France à Ladoumegue. Q
J’imagine que ces derniers jours ont dû être très festifs et très, très longs ?
En tous cas, très forts en émotions et, quant au côté très longs, quand on aime, on ne compte pas donc je dirais plutôt trop courts car on n’a pas vu le moment passer.
Pour Massy, c’est un retour en Pro D2 mais pour une grande partie de l’effectif que vous êtes, c’est une découverte. L’année prochaine, ce sera vraiment le Graal pour vous ?
On a beaucoup soit de jeunes joueurs qui ont connu Massy en Pro D2 quand ils étaient en espoirs et qu’ils commençaient à toucher à l’équipe première soit des joueurs un peu plus comme moi ou Pierre Trassoudaine qui arrivons de la Fédérale et qui n’avons pas connu ça. Donc, ça va être une grande première pour nous l’année prochaine.
Quand tu es arrivé de Cognac à Massy en début d’année, tu t’attendais à faire une saison aussi exceptionnelle avec des phases régulières quasiment parfaites suivies de cette apothéose face à Albi ?
Quand on est arrivé, sur la saison précédente, les 4 premiers se qualifiaient et Massy était à une place de la qualification. Donc, on s’est dit que si on devait aller chercher la qualification à la dernière journée pour après faire de belles phases finales, on le ferait. C’était l’objectif affiché et, au final, on a vu qu’au cours de la saison, l’objectif de la première place et de la saison quasi parfaite semblait plus envisageable et que ce serait celui que l’on prendrait. Non, on ne se l’imaginait pas du tout et c’est énorme.
Tu nous parlais d’émotions et cette double demi-finale, ou double access-match, a été riche en émotions ? Il y a eu ce premier match où vous aviez été déçus car vous êtes passés à travers mais comment avez-vous réussi à vous remobiliser ? Qu’est-ce que vous vous êtes dit durant cette semaine ?
Pendant la semaine, je pense qu’on a été très, très, très studieux, on s’est beaucoup remis en question. On s’est dit qu’on avait fait de belles phases régulières mais qu’il fallait se remettre en question pour trouver les armes et les moyens de battre cette équipe d’Albi qui nous avait posé des problèmes sur le match aller. On a vécu toutes les émotions mais cette semaine a été très studieuse et les regards étaient fermés.
Toi, à titre personnel, est-ce que, peut-être, tu ne t’en voulais pas un petit peu d’avoir pris ce carton jaune ? Tu avais fait un début de première mi-temps stratosphérique, même notre consultant Jean-Christophe Bacca avait loué ton abattage, mais ce carton jaune à la 36e a un peu enclenché la mauvaise dynamique de Massy lors du match aller ?
Il est sûr que de prendre un carton lors d’un match de demi-finale d’accession en Pro D2, on se pose des questions et on s’en veut donc je m’en suis forcément voulu. Mais il a fallu repartir et ne plus y penser surtout que ce n’est pas quelque chose qui m’arrive régulièrement, je n’ai pas pris énormément de cartons dans ma carrière et c’était même la première fois sur ballon haut. Je me suis loupé, je m’en suis voulu et il a fallu rectifier le coche derrière sans y penser.
Quels sont, selon toi, les ingrédients qui ont permis à Massy de faire cette demi-finale retour énormissime puisque vous avez gagné ce match 40-10 de la tête et des épaules ?
Je pense que c’est notre défense en premier lieu car on marque quand même quelques essais en contre et sur leurs moments forts à eux, on n’a pas craqué et on a tout le temps réussi à les renvoyer chez eux. Ils partaient de nos 5 mètres et on arrivait à les renvoyer dans leurs 22 jusqu’à forcer leur jeu au pied donc on a fait de très belles séquences défensives pendant le match. Il y a aussi forcément la touche car, sur le match aller, on n’avait vraiment pas été bon sur ce secteur alors qu’on le sait, c’est le gros point fort d’Albi et que le match s’est joué sur la touche. Donc moi, je dirai beaucoup défense et touche car on a quand même mis 3 ou 4 ballons portés ce week-end.
Ces ballons portés vous ont permis de vous rassurer d’entrée de match avec ce magnifique 50 / 22 de » Mister Clouté » ?
Ce 50 / 22 fait vraiment du bien à la tête et du coup, il nous trouve cette touche presque inespérée et magnifique qui, derrière, nous permet à nous les gros de nous exprimer. C’est beau lorsque les avants récompensent le travail des 3/4.
A la mi-temps, est-ce que vous sentiez que vous teniez le bon bout et que vous alliez le faire ou est-ce que vous aviez encore un brin de doute ?
Il y avait 14-3 à la mi-temps donc on avait un point de retard sur le total donc on s’est dit qu’on avait vraiment fait une belle mi-temps, qu’on tenait le bon bout mais que la 2e mi-temps allait être deux fois plus dur et qu’il ne faudrait rien lâcher car ils pouvaient revenir à tout moment.
Vous avez un peu inversé la vapeur : Albi vous avait poussé à faire des fautes au match aller mais là, c’est vous qui avez poussé le SCA à la faute puisqu’ils ont pris 3 cartons jaunes ?
Oui, on a poussé Albi à la faute, je pense que c’est peut-être le volume de jeu que l’on a proposé qui les pousse à la faute car plus on joue, plus ils sont obligés de faire des fautes en face pour ne pas encaisser de points. Je pense vraiment que c’est ce volume de jeu qui a provoqué leurs fautes et nous a permis de marquer des points.
Le seul point noir est cette petite bagarre de l’en-but et le carton rouge de Pierre Trassoudaine et de Jean-Baptiste Grenot qui vont vous empêcher d’avoir deux armes face à Soyaux-Angoulême pour la finale ? A moins que Trassoudaine ne souhaitait partir en vacances plus tôt ?
C’était une demi-finale très engagée, et même si on a bu une bière après le match, je pense qu’il y avait beaucoup de rivalité sur cette rencontre. Le fait que Mathieu Bonello soit l’entraîneur de Massy l’année passée, le fait que ce soit une vraie demi-finale à enjeu avec de l’ambiance à Massy comme à Albi ont fait que toute la frustration de certains joueurs est peut-être partie sur cette petite générale, qui est bien dommage mais qui fait partie de l’agressivité d’une demi-finale. Quant à Pierre Trassoudaine, de toute façon, il s’était blessé à l’épaule avant donc il n’aurait pas pu faire cette finale.
On va aussi revenir sur le public de Massy qui a quand même fait son œuvre en mettant Ladoumègue » on fire » ?
Le public de Massy a été incroyable surtout qu’il y avait en fait énormément de joueurs des catégories jeunes, le KOP, comme on dit, était composé des espoirs, des Crabos, des Alamercery, de toute cette école de rugby et cette formation qui font que Massy est un grand centre de formation. Ils nous ont vraiment portés pendant tout ce match et on va les remercier dimanche prochain en allant les porter en finale Gaudermen et Alamercery pour leur rendre la pareille.
Maintenant, pour Massy, c’est l’objectif final, la cerise sur le gâteau pour aller chercher un bouclier et un titre face à une redoutable équipe de Soyaux-Angoulême. Mais après la grosse bringue que vous avez faite, ça va quand même être compliqué de réenclencher la machine ?
Non, il faut réenclencher la machine pour récompenser tout ce groupe. On a quand même fini à 108 points cette saison et pour se récompenser et finir cette année en beauté, je pense que c’est très important, en premier pour notre groupe de potes, d’aller chercher un titre. Je crois que ce serait vraiment la cerise sur le gâteau.
On va parler de cette équipe de Soyaux-Angoulême : qu’est-ce que vous redoutez le plus d’elle ?
Soyaux-Angoulême est une équipe qui a joué en Pro D2 pendant 3 ou 4 ans avant et qui est donc une écurie de Pro D2 qui n’aurait peut-être pas dû descendre. Elle a eu du mal l’année dernière en début de saison et qui n’a pas su combler son retard. C’est aussi une équipe qui a su garder 80% de son effectif de Pro D2 donc ils ont de très bons joueurs, c’est une belle équipe et ça va être un gros match. De toute façon, on attend que ça d’une finale.
Quoi qu’il arrive, qu’est-ce que tu retiendras comme image de cette saison ?
Il y a beaucoup d’images cette saison. On peut forcément parler de cette demi-finale aller / retour qui sont des matchs-couperets énormes mais il y a aussi mon intégration au club et mon arrivée au début où j’ai été très bien accueilli. Il y a les moments que l’on a passés dans le Jura lors du stage de début d’année, notre première victoire de la saison, justement contre Soyaux-Angoulême après deux défaites, qui nous fait basculer autre part, la victoire à Valence-Romans avec le bonus offensif … Il y a eu beaucoup de moments forts cette saison qui ont construit notre groupe.
On va finir par la question décalée du #MagSport : on nous dit dans l’oreillette que dimanche, lors de la 3e mi-temps, tu t’es un peu échappé aux alentours d’1h / 1h30. Vrai ou faux, info ou intox ?
Info, je me suis échappé mais on n’en dira pas plus (rires).
Et tu avais un super carrosse pour te ramener ?
C’est une très bonne info, j’avais un super carrosse pour me ramener et je le remercie de l’avoir fait.
On te félicite encore pour cette belle accession en Pro D2 et on vous souhaite le meilleur pour ce soir, en finale face à Soyaux-Angoulême, un match qui va valoir son pesant de cacahuètes
C’est certain.
Propos recueillis par Loïc Colombié
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