#Rugby – Fed1 / R.Boscus (SC Pamiers) : «Il faut avoir le couteau entre les dents»

Romain Boscus est  la recrue phare du Sporting Club Apaméen et arrive en terre ariégeoise avec la ferme idée de croquer à pleines dents dans sa passion après un été douloureux. Ce pur produit aveyronnais nourri à la mamelle du Stade Rodez Aveyron, a vu son club de cœur s’effondrer au cours d’un mois de juin mortifère. Pour le buteur ruthéne, alors que son plan de carrière axé sur la pluri activité, le voyait finir sur la pelouse de Paul Lignon, la liquidation du SRA a sonné le glas d’un happy end stadiste. Lui qui a connu le professionnalisme avec le CO et « Oyo », a mûri ses choix, au cœur d’un mercato fédéral, un brin dérégulé avec la mise sur le « marché » d’une trentaine de ses coéquipiers de Rodez. Malgré de nombreuses propositions, le serial buteur s’est décidé à rejoindre Pamiers, un promu en fédérale 1, dont l’âme et les vertus ont fini de le convaincre. Focus sur Romain Boscus, un joueur dont on peut ressentir les meurtrissures prégnantes des événements estivaux, mais qui compte bien avec la détermination qui le caractérise, aider ses coéquipiers à propulser le SC Apaméen dans cette fédérale 1, et qui sait, faire du Stade Pierre Balussou , un indomptable fief pyrénéen .

 

 

Romain, avant de parler de cette arrivée au Sporting Club Appaméen, à Pamiers, on va commencer cette interview en parlant un peu de ton ancien club, le Stade Rodez Aveyron. Tu es un enfant du cru là-bas, tu as été formé au SRA, tu as fait une grande partie de ta carrière au SRA. Qu’est-ce que t’inspire la situation actuelle c’est à dire la reprise du club en Promotion Honneur après une liquidation qui a laissé beaucoup de traces, j’imagine ? 


Oui, ça a laissé beaucoup de traces en effet. C’est quelque chose de compliqué à vivre étant donné que le club se battait depuis 5/6 ans pour essayer de survivre en Fédérale 1. Il n’en était pas loin, c’est vrai que de payer les pots cassés de personnes qui n’étaient plus au club, c’est assez décevant. Mais bon, le club repart et j’espère qu’il aura de belles années futures.


Tu as des racines aveyronnaises indéfectibles. J’imagine que tu auras toujours un œil sur le devenir du club, même en promotion honneur ? 


Oui, bien sûr. De toute façon, les gens du club, je les connais, les joueurs qui vont réintégrer la nouvelle équipe, je les connais aussi car ce sont d’anciens joueurs. Etant donné que je suis natif de Rodez, j’aurai un œil attentif sur ce qui va se passer là-bas. 


En plus, ce qui est quand même dommageable, c’est qu’il y avait un joli projet de jeu qui se mettait en place à Rodez. On l’avait vu, vous aviez fait trembler VRDR l’année dernière au stade Lignon qui restera sûrement un des summums de la saison. Sur le bord de la route reste aussi quelqu’un qu’on aime bien au Mag Sport, Arnaud Vercruysse, ton ancien coach. C’est quand même dur de voir des gens qui restent sur le bord de la route après cette dissolution du SRA ? 


De toute façon, des joueurs de l’an passé, il n’en reste aucun il me semble cette année au SRA, enfin au Rodez Rugby, au nouveau Rodez. C’est sûr que chaque année, depuis que j’y étais, on avait de belles équipes et de grosses ambitions mais c’est vrai que c’était un poids au quotidien pour les gens qui travaillaient au club, à l’administration. C’est quelque chose qui nous pesait. Effectivement, je pense qu’on avait l’effectif pour faire de belles choses, on avait fait une demi-finale en 2015. Chaque année, on avait de belles équipes, de bonnes recrues qui arrivaient mais c’est vrai que c’était un poids inconsciemment qui pesait dans les têtes de chacun et surtout pour les gens qui travaillaient au club comme Arnaud qui se démenait au quotidien pour faire survivre le club. 


J’imagine que tu es encore en contact avec Arnaud Vercruysse, que vous deviez échanger. Mais tu as des copains, des copains de pré on va dire, qui sont restés sur le bord de la touche, qui n’ont toujours pas retrouvé de clubs 


La plupart ont retrouvé des clubs, que ce soit en Fédérale 2 ou dans des clubs de la Drôme comme Millau, Decazeville et LSA. Ensuite, d’autres sont partis vers de nouveaux horizons comme Nîmes, Chambéry, Dijon, un peu partout en Fédérale 1. Et comme je l’ai dit, de l’équipe qu’il y avait l’année dernière, il me semble qu’aucun joueur n’est resté à Rodez cette année. Donc l’équipe se compose d’espoirs qui restaient, d’anciens qui avaient arrêté qui reprennent en Promotion Honneur pour aider le club, qui sont attachés au club donc ça, c’est très important. 

 

Pour clore cette partie interview sur le SRA, qu’est-ce que tu retiendras de ces années au SRA, de cette aventure humaine ruthénoise et rugbystique ? 

 

Forcément de belles choses même si la fin est décevante. Mais, j’ai rencontré ou revu des personnes qui m’avaient par exemple entraîné quand j’étais tout petit, qui étaient vraiment attachées au club. Ma famille est de là-bas, moi, je suis né là-bas donc forcément, j’avais tout là-bas et mon plan de carrière devait se finir là-bas. Donc, j’en retiendrai deux belles choses : j’en retiendrai le meilleur, les personnes que j’ai rencontrées, les entraîneurs que j’ai pu côtoyés comme Patrick furet et Arnaud (Vercruysse) et les joueurs qui sont passés au club aussi, qui ont donné pour cette ville. 

 

Maintenant, on va rebondir sur l’avenir, sur le fait que tu aies signé à Pamiers. Quand tu t’es retrouvé dans cette situation, c’est à dire au mois de Juillet savoir que tu n’avais plus de club, tu as du gamberger j’imagine un petit peu. Comment as-tu mis en place ton plan pour trouver une nouvelle équipe. Et est-ce que tu as été un peu assailli de demandes en tous genres ? 

 

C’est vrai que je ne m’étais préoccupé forcément de trouver un nouveau club parce-que j’attendais le dernier moment et la sanction qui allait tomber sur Rodez. C’est vrai que ça s’est fait assez tard et suite à cette annonce-là, j’ai quelques clubs qui m’ont contacté qui montaient en Fédérale 1 comme Mazamet, Rumilly et d’autres. Mathias Lledos, avec qui j’avais joué à Castres dans les équipes de jeunes, qui entraîne Pamiers et qui avait arrêté l’année dernière, m’a contacté puis ça s’est fait comme ça. Le fait qu’il y avait d’autres joueurs que j’avais rencontres, avec qui j’avais joué au Castres Olympique en équipe de jeunes, qui faisaient partie de l’équipe de Pamiers a fait que je me suis plutôt penché vers cette ville-là. Le projet aussi est ambitieux. Voilà comment ça s’est fait, assez tardivement, mais je suis très content d’être là. 

 

Et puis, le rugby pyrénéen, on peut dire qu’il dégage certaines vertus, certaines valeurs. Alors, c’est peut-être suranné, ça fait peut-être image d’Epinal mais quand on pense rugby pyrénéen, on pense toujours à cette solidarité, à ce sens du combat. 

 

Oui, ils ont la réputation d’être assez rugueux. Pour avoir parlé avec des joueurs qui les ont rencontrés en Fédérale 2 l’année dernière, c’est un club qui a beaucoup de valeurs de combat, de solidarité. C’est la base du rugby. Après, on monte en Fédérale 1, ça va être autre chose, un nouveau challenge. Déjà, on a un groupe solidaire, un groupe soudé qui monte de Fédérale 2 avec de nouvelles recrues. Je ne sais pas de quoi l’avenir sera fait mais on a un bon groupe. 

 

Et pour augmenter ça, il y a quand même une poule sympa avec pas mal de derbys pyrénéens, des déplacements pas trop loin et des équipes comme Tarbes, Albi ou Blagnac qui sont aussi intéressantes à jouer pour se jauger, pour voir où on est. Cette poule, la poule 3, c’est celle qui fait le moins débat on va dire depuis l’annonce des poules ? 

 

C’est une poule où je pense deux équipes vont se dégager, voire trois avec Blagnac qui est assez régulier depuis quelques années, Tarbes, Albi, qui sont des équipes assez complètes avec de gros effectifs et professionnelles. Donc, ce ne sera pas avec ses équipes que nous allons faire la saison mais c’est vrai que c’est toujours bien de se jauger et de voir ce qui se fait de mieux pour voir où on en est. Je pense que la poule est assez bonne pour pouvoir faire une belle saison et, comme tu l’as dit, les déplacements ne sont pas très longs. On a de la chance de ne pas aller comme certains dans la poule de l’Est là-bas où les déplacements sont très longs, où les week-ends sont assez chargés. Donc, on pourra s’attacher à faire de bons matches ici et après, on verra de quoi la saison sera faîte. 

 

Tu me tends un peu une perche, un peu la même question que j’ai posée à beaucoup de clubs de l’ancienne poule 2. Le parcours de Lannemezan l’année dernière, qui monte de Fédérale 2 et qui va accrocher un Du Manoir, est-ce que ça donne des idées derrière la tête des clubs comme Pamiers qui se disent qu’on peut monter de Fédérale 2 et faire les phases finales et jouer crânement sa chance ? 

 

Ce n’est pas le discours que l’on a ou qu’on entend ici. Le club est conscient qu’il a fait une bonne saison l’année dernière, il est un peu euphorique mais la première des choses, ce sera d’attaquer le 7 Septembre par la réception d’Oloron comme il faut, entamer une bonne saison. Après, comme je dis, l’appétit vient en mangeant mais on ne parle pas de qualification ou de quoi que ce soit ici. C’est d’abord se maintenir, faire une bonne saison et après, on prendra ce qui viendra. Mais voilà, d’abord le maintien, essayer de pérenniser le club qui n’a jamais été dans cette division en Fédérale 1 pour cette saison. 

 

Tu nous parlais de ces équipes pro qui sont mêlées à des équipes comme Pamiers qui sont semi-amateurs, semi-pros. Est-ce que toi, tu n’as pas été tenté à un moment donné, quand il y a eu ce choix après la liquidation du SRA, de rebasculer dans le rugby professionnel ? Parce-que tu y as goûté en jouant au Castres Olympique et à Oyonnax. Où, est-ce que c’est vraiment une volonté de ta part de rester dans ce rugby pluriactif où tu t’y retrouves peut-être un peu plus maintenant ?

 

Ca fait déjà 4 ans que je travaille. Je travaillais au club de Rodez pour la formation de l’école de rugby, j’ai passé mes diplômes au CREPS de Toulouse pour devenir entraîneur. C’est une vocation pour moi de me former et de devenir coach. Donc, je n’avais pas forcément envie de basculer encore une fois dans le monde pro où c’est quand même assez spécial. Pour moi, maintenant, je pense plus à l’avenir, à l’après-rugby mais si j’ai encore, je pense, quelques années devant moi de rugby. Mais, c’est important pour moi de partager que ce soit au club avec les petits ou avec les éducateurs. C’est quelque chose que je faisais depuis 4 ans à Rodez donc je ne me voyais pas rebasculer dans un monde de professionnels, non. 

 

Une question à toi qui a touché les deux mondes : est-ce que ce n’est pas un peu paradoxal que, alors qu’à l’heure actuelle, un peu comme à l’image de Clement Maynadier, il y ait beaucoup de joueurs de Top 14 et de l’élite qui essaient de rebasculer un brin dans la pluriactivité pour, comme ils le disent, un peu s’ouvrir des chakras autre que dans le rugby, et qu’en Fédérale 1, on pousse et on incite les clubs semi-amateurs à devenir semi-pros, voir professionnels ? 

 

C’est peut-être quand on ne connaît pas le monde purement professionnel où on se dit qu’on voit les choses à la télé, où on ne voit que les belles choses. On pense que les rugbymen gagnent énormément d’argent pour pouvoir avoir une après-carrière aisée mais ce n’est pas le cas. Et je pense que les joueurs professionnels s’en rendent compte. Il  y en a beaucoup qui se forment pendant leur carrière et c’est très bien parce qu’on a du temps quand même à consacrer à ça. Et d’autres qui y pensent peut-être un peu moins et qui, en fin de carrière, se font surprendre. Il faut essayer de bien s’entourer pour pouvoir parler aussi avec des gens qui ont connu les deux mondes et faire au mieux. C’est vrai qu’aujourd’hui, si on parle avec les jeunes, ils ont envie d’être professionnel et ne faire que ça. Il faut essayer de parler avec eux pour pouvoir au mieux les diriger. 

 

On va terminer avec une question un peu banale mais qui est quand même obligatoire. Pour un nouvel arrivé, tu es la recrue phare du Sporting Club Appaméen. Quelles ont été tes premières impressions quand tu es arrivé dans ce club de Pamiers ? 

 

C’est un club très accueillant, les gens sont très ouverts. Je ne connaissais pas forcément la mentalité de cette région même si j’avais joué contre des équipes de la région. La région, je ne la connais pas super bien mais c’est un club très accueillant, les gens sont ouverts, les gens sont bien. Et les joueurs sont assez rugueux. C’est vrai que je n’avais pas l’habitude forcément, par exemple, de faire une opposition en fin d’entraînement à chaque entraînement. C’est quelque chose dont il faut prendre l’habitude mais c’est un club qui est ambitieux. 

 

Ca frotte même aux entraînements (Rires)? 

 

Oui, ça frotte aux entraînements, oui. (Rires) C’est quelque chose qui nous habitue au match. Forcément, vu qu’on aura pas beaucoup de matches amicaux étant donné qu’on a repris la saison assez tard vu qu’ils ont fini tard l’année dernière, on essaie de retrouver un peu le rythme des matches et l’intensité en fin d’entraînement pendant 15/20 minutes pour pouvoir s’y habituer. Parce-que c’est vrai que ça va attaquer vite et il ne va pas falloir se perdre en route. Donc voilà, je suis très content d’être là. 

 

Pour conclure, en clair, on peut dire qu’on peut s’attendre à un Pamiers, à l’image de Nafarroa l’année dernière, le couteau entre les dents même face aux gros ? 

 

Oui, de toute façon, il faut avoir le couteau entre les dents, qu’on soit ici ou ailleurs. Mais, ici, c’est vrai que j’ai ressenti cette envie et ce groupe vraiment soudé quand je suis arrivé. On le voit de toute façon, quand tu fais une saison en Fédérale 2, que tu montes. Il y a des joueurs qui sont ici depuis très longtemps, il y a pas mal de joueurs contrairement à nous à Rodez, où j’étais un des seuls à être formé à Rodez, qui sont du pays. Donc ça, c’est très important et on sent cet engouement des bénévoles, de tout le club, des gens qui travaillent au club et des joueurs qui ont envie vraiment de défendre leur place. 

 

L’amour du maillot et du terroir ? 

 

Oui, c’est très important. Moi, étant donné que j’étais à Rodez, c’était très important pour moi. Ici, ce sont les autres qui sont ?mais j’espère qu’on fera une bonne saison.  

 

Et puis, si tu fais une bonne saison, tu seras un appaméen d’adoption après ? 

 

Voilà. Je pense que d’ici le stage de fin août, on sera tous appaméens. Il n’y aura plus recrues, il n’y aura plus d’anciens, on sera tous dans le même bateau.

 

Le rugby est le meilleur vecteur d’intégration comme on dit?

 

Voilà c’est exactement ça !

 

Et bien, on va finir sur cette note positive et on te souhaite le meilleur pour cette saison 2019-2020 sous tes nouvelles couleurs

 

Merci à toi .

Propos recueillis par Loïc Colombié

 

 

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