On continue, durant cette intersaison 2019, notre tour de France de la fédérale 1 du côté de la Bourgogne, mais ce coup-ci avec une tête bien connue du Stadium Municipal d’Albi. Nous sommes allés à la rencontre de l’entraîneur des arrières de l’AS Mâcon Rugby, Andreis Jacobus « André » Hough. En clair « Dédé » pour les aficionados, de l’ancien ouvreur du Sporting Club Albigeois. Celui qui, il y a encore peu écumait les pelouses de Top14 et de ProD2, s’est reconverti avec brio en coach, avec une victoire en Du Manoir dès sa 1ere saison. Avec sa gentillesse et son humour légendaire, le plus albigeois des Sud-africains, a bien voulu nous dresser le portrait d’un club, l’AS Macon qui ne manque pas d’ambition. Au pays des vignobles, le rugby est un nectar, dont André Hough semble se délecter en pays mâconnais.

André tu nous disait, quand on t’a joint, être heureux de réentendre l’accent du Sud. Ca te donne un peu de soleil même si il en manque pas en Bourgogne pour l’instant. Tu es si nostalgique que cela, d’Albi? (Rires)
Non, (Rires) on a pas mal de soleil ici aussi. Et même, pour la première fois de ma vie, j’ai gardé l’accent que j’avais adopté dans le sud, c’est bien ça aussi. Mais j’avoue , que je suis content d’entendre un peu l’accent du sud, ca fait du bien. (Rires)
André, pour une première année en tant que coach à Mâcon, c’est une première année plutôt bien réussie puisque, au bout du bout d’une belle aventure , il y a la timbale, ce bout de bois, il y a ce trophée Yves du Manoir ?
C’était une belle expérience. De toute façon, dans la vie d’entraîneur, c’est toujours ça, c’est les bons moments, les mauvais moments. On avait un groupe super jeune. Donc, je suis très heureux d’avoir fait partie de ce groupe qui a remporté cette victoire en Yves du Manoir. C’est super.
On dit que l’appétit vient en mangeant. Pour cette seconde saison en tant qu’entraîneur de Mâcon, on imagine que tu veux peut-être aller voir plus haut avec tes hommes ?
Moi, j’ai toujours eu de l’ambition, comme quand j’étais joueur. Mâcon a le projet de monter en Pro D2 dans trois ou quatre ans. Du coup, je suis partant pour ça. J’ai encore un an de contrat et j’ai envie de partager ça et de donner le plus possible pour obtenir cet objectif.
On a vu qu’à l’intersaison, même un peu avant, il y a eu du mouvement à Mâcon avec le retour du président Piguet. Une des stars locales, en l’occurrence Guillaume Aguilar, qui a été nommé manager. Comment le groupe et toi, en tant que membre du staff, avez-vous vécu tout ces changement qui se sont opérés autour de l’AS Mâcon ?
Honnêtement, on a tous été surpris parce que Guillaume, c’était un joueur leader de touche et tout ça, c’est un ancien du club. Le club a fait son choix de le nommer manager parce qu’il a beaucoup, beaucoup de vécu. Donc, c’était une surprise pour tous. Moi , j’étais toujours dans l’objectif donc surpris comme tous mais c’était fait. Maintenant, il faut aller de l’avant parce-que si on reste toujours sur le choix qui se fait dans un club, c’est pas le plus important. Le plus important, ce sont les joueurs qui performent tous les week-end et notre travail, c’est de faire avancer les joueurs, pas l’inverse. Pour moi, ils ont fait ce choix là, on respecte le choix du président et on avance.
Et le retour du président Piguet, ça n’a rien changé pour vous, pour le staff ?
Il y a beaucoup d’ambitions dans le club et il y a eu beaucoup de mouvements dans l’organigramme. Il y a beaucoup de gens qui ont été mis en place, des vice-présidents et tout. Déjà, la grosse amélioration à faire dans le club, c’était la communication. L’autre chose, c’était l’équipe jeune, les espoirs. On a fait un gros recrutement par rapport à ça parce que c’est l’équipe qui nourrit l’équipe une. Il y avait plein de choses à faire partout en fait. Donc lui, il a pris du recul par rapport à ça et depuis qu’il est revenu, ils sont toujours en train de mettre des choses en place. On ne le voit pas souvent.
En parlant de recrutement, en équipe première, on imagine que Mâcon s’est renforcé pour ses nouvelles joutes puisque vous êtes tombés quand même dans une poule assez costaud avec Dijon, Massy, Chambéry. Ca va frotter sec dans les rucks ?
Quand on est arrivés l’année dernière, c’était déjà fait. Cette année, il y a moins de personnes non voulues , honnêtement. On a recruté des joueurs très jeunes mais aussi certains joueurs expérimentés devant comme Louis Mathieu (Jazeix NDLR), comme Romain (Maurice NDLR) qui arrive de Dax et on a des 3/4 derrière qui sont très jeunes mais qui sont capables de jouer. On a réussi avec cette équipe l’année dernière, et déjà dans la poule l’année dernière on avait Bourgoin, Nice, Hyères-Carqueirannes, on avait une grosse, grosse poule. Cette année, c’est toujours pareil mais c’est à nous de ramener des joueurs les plus intelligents possibles pour être prêt pour ce type de défis.
Et tu vas peut-être pouvoir nous éclairer, qu’est ce qui s’est passé avec Elliot Bale ? Il a été annoncé un temps à Mâcon et on appris que le contrat aurait été rompu avec Eliott Bale. Qu’est ce qui s’est passé avec ce joueur plein de talent qui arrivait de Grasse ?
Avec Elliot Bale, ça s’est bien passé pour le club, pour lui aussi il a trouvé une nouvelle aventure , on a récupéré un autre joueur, un français, Romain Alleyragues, qui vient de Nîmes et qui a signé avec nous. J’espère pour Eliott qu’il a trouvé quelque chose qui lui plaît un peu … Honnêtement.
Dans tous les cas, vous ne vous êtes pas quittés en mauvais termes, c’est juste, on va dire, une incompréhension entre le joueur et le club.
Oui, voilà, c’était un truc comme ça, je pense. Le club a laissé le joueur très autonome, c’est un joueur qui n’a pas laissé trop faire le club.
On va parler de quelque chose d’un peu plus perso pour toi. Quel changement le plus notable il y a entre être joueur de haut niveau et entraîneur de Fédérale 1 ?
Déjà, la première chose, c’est que je me suis toujours dit que je voulais pas être entraîneur sauf que le premier goût que j’ai eu de ça, c‘était énorme. On a des jeunes qui ont très, très envie, qui sont très demandeurs d’apprendre. De partager mes connaissances de rugby, même si je ne connais pas tout, tout ce partage qu’il y a eu avec les joueurs, c’est énorme pour moi, c’est super spécial et je me vois pas faire autre chose que de vivre de ça.
Tu as la passion et quand on a la passion, on tombe vite dans la marmite du coaching?
Oui, c’est exactement ça. J’aimerai donner beaucoup plus aux joueurs parce que j’aimerai que les jeunes réussissent. Et en France, on a un souci avec la formation jeunes, qui est en train de s’améliorer, à cause des étrangers dont j’ai fait partie. Moi, je suis français, je suis aussi là pour partager mes connaissances, pour donner le plus possible pour le buteur, pour le 10. En plus, en France, on a un souci puisque le joueur qui fait le jeu, le 10, on n’a pas beaucoup de jeunes qui soient formés pour ça. J’aimerais participer par rapport à ça et pour améliorer ce côté.
Tu me tends la perche. Sur un terrain, tu avais un sérieux coup de pattes. La patte Dédé Hough, en tant qu’entraîneur, c’est quoi ?
Tu parles du jeu au pied là et surtout pas de la vitesse (rires) ! Dans chaque pays, le buteur copie le buteur légendaire de son pays. Les mecs en Angleterre copient Wilkinson, en France, c’est Michalak, en Afrique du Sud, c’était les Steyn. Moi, mon objectif, c’est de faire comprendre au buteur qu’il faut qu’il bute comme il le sent et non de copier le style d’une autre personne. Il faut qu’il bute comme il se sent, pas comme quelqu’un d’autre. J’ai entraîné pas mal de buteurs en France, la plupart des buteurs ont tous le même style de but. C’était les anciens Yachvili, Frédéric Michalak et tout ça mais je suis là pour le faire comprendre de marcher pour eux.
Michalak s’inspirait aussi grandement, comme ses prédécesseurs, de Christophe Deylaud qui avait beaucoup marqué le milieu des buteurs français, dans sa posture.
Si ça trouve, Michalak a adopté une façon qui a marché pour lui. Sauf qu’aujourd’hui, on a beaucoup de jeunes qui essaient de copier la même mais ils n’ont pas réussi à adapter leur manière de buter, surtout pour reculer, avec ou sans la fatigue. Moi, j’adore ça, filmer les joueurs, leur faire comprendre .
En clair, il faut qu’ils soient eux-mêmes.
Oui voilà, exactement. C’est mon objectif dans le jeu, dans le jeu au pied, dans les choix qu’ils font, c’est qu’ils s’adaptent le plus vite possible eux tout seuls. C’est pas à nous de le faire. On aide le plus possible sauf que le jour où ils rentrent sur le terrain, ils sont tout seuls. On n’est plus sur le terrain donc il faut qu’on essaie de faire jouer les joueurs comme toi tu veux qu’ils jouent, pour qu’ils aient le meilleur après.
Toi qui as connu le haut niveau il y a quelques années, ce n’est pas si lointain, tu n’as pas l’impression que cette Fédérale 1 maintenant que tu viens d’y goûter comme entraîneur pendant une saison, que ça ressemble de plus en plus à la Pro D2 d’il y a 7, 10 ans ?
Je n’ai pas joué en Fédérale 1, j’ai joué quelques matches l’année dernière parce que c’était obligé à cause des blessures, mais pour moi, la Fédérale 1, c’est un très, très bon niveau. Il y a beaucoup de clubs qui sont au point, beaucoup d’autres clubs qui sont un peu en retard mais ça, c’est dans chaque niveau quand ils montent. Il y a des supers clubs comme Bourgoin, Chambéry, un très bon club aussi c’est Hyères-Carqueiranne même Nice, c’est costaud, ça tape très, très fort. On dit souvent aux nouveaux joueurs, car on récupère beaucoup de jeunes qui viennent de la formation de leurs anciens clubs, que la Fédérale 1 et les espoirs de leurs clubs élites, ce n’est pas pareil. Ils sont bien conscients de ça, c’est pour ça que l’an dernier, en gagnant le Yves du Manoir, ça a fait un coup de boost à nos jeunes joueurs et ça leur a montré qu’ils sont capables de faire plus de choses.
Cette année, en allant gagner ce challenge Yves du Manoir, tu as placé la barre haute. Pour cette seconde saison, ça va être dur de faire beaucoup mieux parce qu’il y a du monde au portillon qui va se battre pour se qualifier en Jean Prat. Ca va être dur de garder le curseur aussi élevé ?
Notre objectif, et le président nous a clarifié ça aussi, c’est de jouer le haut du tableau. L’année dernière, on a fini 5es et, si on veut jouer le haut du tableau pour monter, il faut finir 1er ou 2e. Donc, ça va être tous les week-end. En plus, on a beaucoup de travaux au stade qui se font donc nos 4 premiers matches seront obligatoirement à l’extérieur. Donc, le plus vite on fait comprendre à nos joueurs qu’en France, si tu veux être une très bonne équipe, il faut gagner à l’extérieur et pas qu’à la maison. Ca, personnellement, je trouve que c’est une maladie française. Dès qu’on arrivera à faire ça, on prendra des points n’importe où, on ira n’importe où jouer des bons matches. Si on joue notre plan de jeu où on reste propres et disciplinés, il n’y aura pas de problème .
Et puis, il y a aussi la petite suprématie bourguignonne, aller titiller Dijon et Beaune dans les derbys ?
De toute façon, c’est comme partout. Dès que tu joues un derby, par rapport à la discipline, ça change beaucoup. C’est des bons matches, c’est joli partout. Même, on dit Beaune, Dijon, mais Chambéry est à une heure d’ici.
Villefranche-sur-Saône n’est pas loin aussi.
Oui, Villeurbanne pareil, c’est vers Lyon. Donc, on a pas mal de derbys.
Je vois que t’es bien acclimaté à la Bourgogne. J’imagine que tu as dû goûté aussi aux spécialités locales, entre autres le bon vin de Mâcon et d’ailleurs ?
Tout le monde m’a demandé quand je suis arrivé à Mâcon si j’aimais le vin. Je n’ai pas trop compris sauf que depuis l’an dernier jusqu’à maintenant, j’ai tout compris en fait. J’essaie de ne pas trop fort le mouvement dans ma bouche comme tout le monde fait ici parce que je recrache à moitié mais après, c’est du très bon vin.
Ah oui, tu es tombé dans l’excellence française. La Côte bourguignonne, c’est l’excellence française viticole .
Oui, des supers vins, c’est un endroit super joli en plus. Avec ma femme, on habite à la campagne, dans les vignes, dans le vignoble. C’est magnifique donc on est super contents. Ca se passe bien, on est contents oui.
Puis c’est un pays où ils font le vin avec amour, c’est comme sur un terrain de rugby quand tu fais les choses avec la passion , ont, on fait toujours de belles choses au bout.
Pour faire un apéro ici, déjà, ça s’arrête jamais. Je me suis déjà fait avoir deux trois fois avec un apéro tranquille mais c’est pas tranquille du tout. Les œufs meurette, c’est super bon, l’andouillette que j’ai vue ici, c’est impressionnant. Honnêtement, moi qui n’ai fait qu’Albi et Pau dans ma vie, je pensais connaître toute la France et ce n’est pas vrai du tout. Là, on est dans la Bourgogne et c’est complètement autre chose. C’est magnifique comme pays aussi.
Ca y est, tu es devenu un véritable VRP du Mâconnais.
Pas tout à fait (rires). Il faut que je goûte plus de vins, il faut que j’ai plus de ?. Je pense que j’ai perdu un peu de palais mais après, il faut juste s’entraîner. Et pour s’entraîner, il faut goûter.
Allez, pour conclure cette interview, un petit mot à nos amis albigeois, qu’il soient supporters, joueurs ou encore Arnaud Méla avec qui je sais que tu entretiens des relations fort amicales.
Arnaud a un très gros défi avec Albi mais Albigeois une fois, toujours Albigeois. On souhaite que le club remonte parce que c’est un club de cœur. Je sais que tout le monde va s’y filer avec Arnaud et va tout donner. Ce n’est pas un problème, je leur fais confiance. il faut qu’ils jouent avec leurs capacités. Moi, je ne vois pas de problème pour Albi.
On va finir sur ces notes positives et on te souhaite le meilleur pour cette seconde saison en terres mâconnaises.
Merci, c’est très gentil. La prochaine fois que tu es dans le coin, tu me le dis avant comme ça, je fais semblant de connaître la dégustation de vins et on en fait une. (Rires)
Le rendez-vous est pris Dédé (Rires)
Ok Loïc , et a très bientôt sur les terrains de fédérale 1.
Propos recueillis par Loïc Colombié