Loïc Colombié, Jean Marc Aué et Jean Christophe Bacca ont demandé à l’entraîneur principal du SC Albi, Kevin Boulogne lors du plateau d’après match d’analyser la victoire des jaunes et joués face à Chambéry et de se projeter sur la rencontre face au Rouen Normandie Rugby.

C’est une victoire qui donne du baume au cœur au SCA et qui vient valider cette fin de bloc ?
Oui, tout à fait, je pense qu’elle fait surtout du bien dans les têtes des joueurs après la contre-performance à Niort, pas forcément sur le rugby mais principalement sur l’état d’esprit et ce que le groupe n’est clairement pas. C’était la première fois qu’on les voyait comme ça depuis deux mois et demi et ce soir, le seul objectif qu’on avait demandé, on n’avait même pas parlé de résultat, c’était de respecter les valeurs, de respecter le maillot et de montrer leurs vrais visages. Depuis deux mois, on a vraiment un groupe câblé et ce soir, franchement, c’est contrat à 100% rempli même si tout n’est pas parfait, elle fait du bien sur les valeurs et sur l’état d’esprit du groupe.

JCB : C’est plutôt bien résumé car après la contre-performance de Niort, l’équipe d’Albi devait marquer ce terrain de son empreinte, elle l’a fait de la plus belle des manières. Je connais ton amour du jeu, j’ai eu maintes fois l’obligation de te calmer parce qu’il avait tendance à beaucoup jouer lorsque tu étais sur le terrain et je trouve qu’aujourd’hui, ta stratégie sur le terrain était la bonne car tu as beaucoup alterné entre le jeu de passes et l’alternance dans les couloirs dans le jeu au pied, il y a aussi eu la qualité de la conquête qui a permis de réaliser des mauls intéressants. Je trouve qu’aujourd’hui, on a eu un match abouti mais est-ce que tu as voulu cette stratégie ou s’est-elle imposée par rapport à cette équipe de Chambéry ?
Très bonne question, on voit que tu es un connaisseur du rugby (rires). Depuis un mois et les 3 premiers matchs, au début à Bourgoin, on n’a pas été bons dans la stratégie et on a travaillé dessus, ensuite, on a été bons dans d’autres aspects dont l’alternance donc on a travaillé dessus et depuis 3 semaines, on avait demandé d’avoir un match complet. Au début, on jouait de partout dans les 22 puis on a réussi à alterner, ensuite, c’était trop au pied donc en fait, il n’y a jamais eu un juste milieu construit. On leur a donc donné un point et ils l’ont fait, on leur a donné un autre point et ils l’ont fait aussi sauf qu’aujourd’hui, on voit que les joueurs sont imprégnés de ça et ils ont très bien su alterner dans la stratégie entre les ballons qu’ils avaient envie d’accélérer et ceux qu’ils ont voulu ralentir, je pense qu’il y a eu aussi un coup de vice de la part de nos piliers de vouloir souffler à un moment pour pouvoir remettre du gaz derrière en mêlée. Aujourd’hui, ils ont vraiment fait un gros match en termes de cœur et de stratégie, oui, c’était un souhait de notre part mais encore fallait-il que les joueurs aient la faculté de le mettre en place et ce soir, on peut les féliciter sur ça.

JMA : Au-delà des 3/4, on a eu l’impression que vous n’aviez jamais été en danger tout au long du match, à part un petit quart d’heure en 2e mi-temps. On a aussi eu l’impression que vous maîtrisiez votre jeu, votre envie et que malgré le calibre et le statut de Chambéry, je ne vous ai pas trop senti en danger et plutôt sereins Nous, nous étions dans les tribunes donc c’est souvent plus facile mais est-ce que vous, du bord du terrain, avez eu ce sentiment de maîtriser malgré la qualité de l’adversaire qui était de haut calibre aujourd’hui ?
Franchement, oui, je te rejoins aussi là-dessus. Ils sont venus 2 ou 3 fois près de notre ligne mais c’était surtout sur du jeu au pied, des ballons tombés et non pas sur des actions construites, l’essai par exemple est clairement un exploit individuel. C’est vrai qu’on a été très bien en place sur ça, les mecs ne se sont pas affolés mais le fait qu’il y ait eu la stratégie, qu’on les ait bloqués et acculés chez eux, que le jeu de pression au pied n’a pas été très offensif comme sur les chandelles des 9 ont fait qu’à chaque fois qu’on perdait des ballons, c’était dans leurs 50. C’est donc vrai qu’on n’a jamais réellement eu cette pression, ce qui est très positif et ce qui est encore plus positif, c’est que quand il y en a eu, les mecs sont allés se le chercher. A Bourgoin, on prend un essai sur un 50 / 22, ils viennent une fois dans nos 22 en 2e mi-temps et on prend un essai, c’est pareil à Niort, on domine 20 minutes même si on n’était pas très bons, on prend un 50 / 22 et un essai mais aujourd’hui, ils ont vraiment défendu la ligne ce qui était très positif à voir et je pense que ça a fait plaisir même le public, en connaisseurs qu’ils sont sur les guerriers albigeois que d’autres ont prôné avant moi, mais surtout à nous aussi.

Pendant la première demi-heure, vous mettez cette équipe de Chambéry sous l’éteignoir. Est-ce qu’il y a une faille que vous aviez isolée ? Quelle est un peu la recette pour avoir fait déjouer cette équipe chambérienne qui est quand même l’un des cadors de la division ?
Non, je vais être honnête, on n’a sincèrement pas ciblé de faille particulière dans cette équipe qui est vraiment bien en place. Ce qu’on a juste ciblé dans les vestiaires, et que j’ai rappelé avant le match, c’est qu’aujourd’hui, on était à domicile, on leur a donc demandé de mettre un cœur énorme et en fait, c’est simplement en gagnant les collisions, en déblayant des ballons propres, en défendant ensemble et en l’équipe au fer rouge qu’on a réussi à gagner les collisions, à avancer et à produire plus de jeu. Le rugby, ça passe par des fondamentaux, je ne pense pas que Jean-Chris ni Jean-Marc me contredisent, car s’il n’y a pas de fondamentaux, il n’y a pas de jeu derrière et je pense que ce soir, c’est une osmose avants / 3/4 mais que c’est surtout notre cœur qui ont fait qu’on a réussi à mettre notre jeu en place.

La première période est quasiment parfaite mais le seul petit bémol est peut-être de ne pas avoir assez scoré et de les avoir laissés dans la partie, si on veut être un peu tatillons ?
On peut bien sûr être tatillons mais si on regarde Chambéry, on voit que le match était coup pour coup, même si on n’est pas trop en danger, ça reste une grosse équipe où on sentait qu’on pouvait être en danger à chaque accélération mais l’équipe a bien répondu. C’est vrai qu’on vient 2 ou 3 fois dans leur camp et je pense qu’il y a des ballons qui, si on paniquait un peu moins près des lignes, si on construisait un peu plus comme on le voit à la fin du match qui est un peu tendue pour rien. On voit qu’on travaille bien au cœur, Théo appelle bien dans l’axe mais on fait le temps de trop et on se fait gratter donc ça, on ne doit pas le voir car si Théo le prend et prend le drop, je pense qu’on ne tremble pas, on tape en touche sur le coup d’envoi et c’est fini. Il faut donc aussi grandir là-dessus, être plus tueurs et plus construits dans les zones de marque.

Un petit bilan de ce premier bloc et une projection sur le prochain ?
On ne va pas se mentir, c’est un bilan positif. On prend un bonus à Bourgoin qui n’avait pas été pris depuis deux ans, on gagne à la maison contre Massy sur un match mitigé d’une mi-temps / une mi-temps et on finit à la maison sur une victoire et un match abouti donc deux victoires et un bonus défensif sur 4 matchs. Si tu me demandes si je suis content ou pas, je signe maintenant si tous les blocs sont comme ça car je pense que vu l’homogénéité de ce championnat, je prendrai tout ce qui se présente. Ce qui fait surtout plaisir, c’est de finir comme ça avant la semaine off et, je le dis en toute transparence, d’entendre Jean-Marc et Jean-Chris dire des choses positives comme ça, c’est ce qu’on essaye de cultiver, ce qu’on essaye de garder, cette image albigeoise qui a toujours existé. Ça fait vraiment plaisir parce qu’on était vraiment sous pression, pas la pression de la saison parce qu’elle est longue, mais la pression du début de saison, d’attendre l’équipe pour se lancer, d’attendre un déclic et un match abouti pour pouvoir se dire » enfin, on est libéré « . On l’a ce soir donc tout cumulé, ça n’est que du positif, il y a bien sûr encore des choses à travailler mais avec un cœur comme ça, on peut bosser.

Le prochain match est à Rouen et on te revoir il y a 7 ans attendre invariablement la pénalité de la gagne face à Rouen. Lorsque tu vas refouler la pelouse de ce stade Diochon, qui est l’une des plus belles pelouses de Nationale, je pense qu’il va y avoir l’armoire aux souvenirs qui va s’ouvrir ?
Oui parce qu’on ne va pas se mentir, cette injustice reste ancrée dans les joueurs et même dans l’histoire du club. Après, ce ne sont plus les mêmes personnes ni les mêmes joueurs, ça reste le même stade mais ce n’est plus la même aventure, personnellement, ça m’embêtait mais je pense que, quelque part, chaque génération a son histoire, la mienne était plus sur Rouen avec la montée mais aujourd’hui, on est passé à autre chose. Je l’aurai dans un coin de la tête mais je n’en tiendrai pas importance parce qu’en fait, c’est complètement autre chose et qu’on est passé à autre chose, avant, j’étais joueur, aujourd’hui, je suis entraîneur, qui l’eut cru ? On va y aller avec des ambitions, on va y aller humbles, on va travailler et comme je le dis, la marque de fabrique albigeoise était de ne jamais rien lâcher et c’est ce qu’on fera toute la saison quoi qu’il arrive.

On peut se dire que du côté de Brive, il y en a un qui va regarder ce match avec attention ?
Oui, encore plus que moi (rires). Je pense qu’Arnaud et Jérémy l’ont vécu encore plus intensément que nous car ce sont des saisons qui auraient dû être abouties pour eux, on ne va pas se le cacher, ce sont peut-être les saisons où on aurait dû remonter. Je leur fais donc un petit clin d’œil car moi, c’est avec eux que j’ai grandi, tant en tant qu’entraîneur lorsqu’Arnaud m’a gardé avec lui qu’en tant que joueur quand il m’a repassé sur le terrain car c’est assez atypique. Aujourd’hui, de me retrouver là, je me dis que la boucle n’est pas encore bouclée mais qu’elle y est.

Propos recueillis par Loïc Colombié

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