Après une belle carrière l’ayant mené de Castres à Aurillac pour se conclure la où tout avait commencé à Albi, Pierre Roussel a raccroché les crampons à l’issue de la désillusion face a Suresnes lors des 1/4 de finales d’accession en Pro D2. Mais celui qui fut le capitaine des jaunes et noirs lors de deux dernières saisons en Nationale, ne va pas quitter la cité épiscopale, car le club de la préfecture tarnaise compte bien en faire un des hommes du SCA du futur. Sous le patronage de l’actuel Directeur Général, Jean Jacques Veyrac, l’ex 3eme ligne va découvrir un poste aux champs de compétences élargis et transversaux et plonger à peine sa carrière terminée dans un nouveau pan de sa vie professionnelle. Fidèle à sa réputation d’homme humble et de raison, Pierre Roussel a évoqué ce nouveau challenge avec modestie tout en ayant l’œil qui brille à l’aube de ce nouveau défi.
Comment s’est fait la genèse de cette nomination au poste de directeur général Adjoint du SCA ?
Pour reprendre ce que Jean-Jacques (Veyrac) disait, j’avais décidé d’arrêter le rugby il y a maintenant un an donc tout était clair dans ma tête. J’avais préparé ma reconversion puisque j’ai un Bac +5 en gestion de patrimoine, je ne m’étais donc pas forcément orienté dans ce genre de poste mais quand le club est venu me voir et me l’a proposé, je pouvais difficilement refuser car c’est quelque chose qui est super intéressant, comme je l’ai dit à Jean-Jacques, quand on se réveille le matin, on est excité de faire ce genre de job. Ça s’est donc fait tout naturellement, je n’ai pas hésité deux secondes à reprendre ce poste-là surtout que j’ai un tuilage qui va se faire avec Jean-Jacques durant une année et demi, c’est vrai que tout seul, ça aurait peut-être été un petit peu difficile. Quand je suis arrivé, je n’aurais pas pensé que le téléphone aurait sonné autant, je le dis en rigolant mais je pense que moi, je vais prendre les airpods, ça sera plus simple. Comme Jean-Jacques le disait, c’est un poste qui va à 360°, on est en train de finir le recrutement, il y a les partenariats et plus de 300 partenaires à rôder sur le marché et à rencontrer, il y a la communication, le droit social, gérer les contrats. Il y a donc plein de choses à voir, c’est super intéressant et j’ai évidemment accepté ce nouveau challenge pour moi.
En plus de ta formation interne aux côtés de Jean Jacques Veyrac (l’actuel DG) vas-tu entreprendre des formations complémentaires pour bien appréhender le poste ?
Je vais refaire une licence sur le plan comptable, sur le droit social et le management pour me re-former. C’est vrai qu’il y avait un gros volet sur la compta à présenter à la DNACG donc je vais me re-former sur ça pendant un an et je pense que 16 mois, c’est la bonne durée car comme ça, ça ne nous met pas trop de pression dans le temps. Ça fait une saison + une demi-saison donc c’est assez intelligent.
Tu étais la courroie de transmission de Mathieu Bonello dans le vestiaire et tu vas maintenant être la courroie de transmission entre Mathieu et les bureaux et la partie sportive. Ça change un peu de paradigme ?
Oui mais le principal, c’est la franchise. Avec Mathieu, on se connaît depuis des années, on s’est connu quand moi, j’étais jeune à Castres donc ça s’est fait naturellement. Il est sûr que je l’ai beaucoup plus au téléphone qu’avant mais quand il y a des bases saines, il n’y a pas de problème sur ça.
Comment est-ce que tu vas prendre de la hauteur par rapport à tes anciens coéquipiers car il va t’en falloir un petit peu ?
Oui, c’est évident. Du fait de mon âge, j’avais peut-être déjà une distance un petit peu naturelle avec les plus jeunes, je n’étais pas celui qui bringuait le plus donc les choses se faisaient naturellement. Elles continuent à se faire naturellement, je vais forcément mettre une barrière, ce qui est logique car, par exemple, quand on doit renégocier les contrats, je me mets obligatoirement de l’autre côté. J’ai connu le rugby donc il y a des choses que je vais évidemment garder mais ils sont assez intelligents pour comprendre qu’il y aura le Pierre au SCA au boulot et le Pierre en-dehors du boulot, ils sont assez intelligents pour le comprendre.
Est-ce que le modèle et le projet de club que tu as connu à Aurillac vont être inspirant pour toi ?
C’est vrai qu’Aurillac ne faisait pas la course à l’armement comme certaines équipes de Pro D2 le faisaient donc Aurillac, assez intelligemment, recrutaient de jeunes joueurs, peut-être pas que français car c’est vrai que les meilleurs joueurs partaient souvent soit à Clermont soit ailleurs. Ils recrutaient de jeunes joueurs étrangers, il y avait une grosse filière géorgienne à Aurillac mais du coup, ils les faisaient passer JIFF car, selon les règles de la LNR, si on fait 3 ans de formation, on est clairement considéré comme JIFF. Ensuite, s’ils performaient en équipe première, ils repartaient dans d’autres clubs de Pro D2 ou de Top 14, ils récupéraient la clause et ils pouvaient après réinvestir. C’est vrai que le modèle d’Aurillac était peut-être parfois un peu décrié mais c’était assez intelligent car Aurillac ne pouvait pas garder ses meilleurs jeunes joueurs donc ils allaient en recruter d’autres ailleurs. Ce modèle économique de former de jeunes joueurs et de ne pas aller chercher de gros contrats pros à l’extérieur est intéressant même si on est toujours obligé d’aller chercher 3 ou 4 joueurs avec un peu d’expérience car ce sont eux qui vont arriver à gérer un peu le vestiaire, il faut un peu gérer les jeunes joueurs, avoir ce lien entre les jeunes et le staff donc c’est aussi important de garder 3 ou 4 joueurs d’expérience car ça rassure aussi un groupe.
On parlait de nouvelle vision et tu en seras peut-être l’un des garants, un trentenaire qui a peut-être un autre esprit que Jean-Jacques et Alain qui sont plus proches de la soixantaine. Que vas-tu essayer d’amener comme modernité au club ? J’imagine que la communication doit être quelque chose qui te botte mais pas que ?
Avant de vouloir changer, il faut déjà bien analyser le club. Ça ne fait qu’un mois que j’ai commencé donc j’écoute beaucoup au début, je pense qu’il y a une grosse partie d’écouter et d’apprendre, je note beaucoup de choses. J’essaye de vraiment m’imprégner du côté club car je n’étais que du côté joueur donc, sur ce premier point-là, je pense que ça va déjà me prendre quelques mois pour faire le lien entre la SA et l’association pour comprendre comment tout fonctionne et comment ça se passe avec l’association, que je connaisse vraiment tout du club en profondeur avant d’amener quelque chose. Je pense que c’est vraiment important de bien connaître le club et après, forcément, en fonction de l’analyse que j’aurai faite, il y a aura peut-être des choses qui changeront dans un second temps. En premier lieu, pour moi, c’est vraiment bien connaître le club, en faire une sorte de » diagnostic » pour ensuite me l’imprégner à ma sauce et voir ce que je pourrai peut-être lui amener. Au niveau du sportif, je connais les joueurs donc quand il y a du recrutement à faire avec Jean-Jacques, je peux passer 2 / 3 coups de téléphone, c’est plus facile.
Est-ce que tu es satisfait de ta première participation au recrutement ? Vous évoquiez avec Jean-Jacques le côté filou des agents, qu’est-ce que tu peux nous dire de cette première expérience maintenant que tu es passé de l’autre côté ?
Je l’ai pris en cours de route car, comme je le disais, je suis arrivé il y a un peu plus d’un mois. Le recrutement est intelligent, je pense que nous sommes allés chercher des joueurs qui n’ont pas forcément de gros noms comme on le faisait sur les années précédentes mais, pour ceux qui connaissent vraiment le rugby, des joueurs qui ont un gros potentiel. Il faut aller chercher des joueurs qui ont une marge de progression, on ne peut pas aller chercher des joueurs qui ont déjà un gros nom, ça va être la surenchère donc on a misé sur de jeunes joueurs qui ont un potentiel et c’est à nous de les former et de les accompagner sur le haut niveau. Concernant les agents, j’ai gardé le mien sur toute ma carrière et j’avais de très bons rapports avec lui mais c’est vrai que je découvre des agents un peu plus » coquins « , il y a des histoires de com mais bon, on arrive toujours à travailler intelligemment ensemble. C’est vrai qu’il y a quelques petites ficelles que je dois encore apprendre.
Le recrutement qui, je crois, est presque terminé, vous paraît adéquat avec ce que vous avez dit précédemment à savoir aller le plus loin possible ?
Notre ambition est de former nos jeunes joueurs donc, en formant nos jeunes joueurs, on verra où nous mène cette première saison d’une nouvelle ère.
Quel message veux-tu envoyer aux jeunes joueurs et la formation qui seront dorénavant au cœur du projet albigeois ?
Ce qui est important, et je suis passé par là, c’est que quand on est jeune, on a une ou deux fois notre chance quand il y a une blessure ou un match à l’extérieur et c’est à ce moment-là qu’il faut saisir sa chance. Ces jeunes joueurs auront donc peut-être plus de chance qu’ils n’en ont eu dans le passé, c’est donc à eux de la saisir à un moment donné.
Quand on t’avait quitté à la fin du match contre Suresnes, tu étais au fond du seau car tu aurais imaginé une autre sortie avec un happy end. Le fait de prendre ce challenge ici dans les bureaux t’a permis de ne pas trop gamberger et de te re-focaliser sur un nouvel objectif de suite ?
Moi, j’avais décidé d’arrêter le rugby depuis très longtemps et je savais que ça ne serait peut-être pas mon dernier match mais en tous cas l’un des derniers donc, dans ma tête, tout était clair depuis des mois. Je savais que j’arrêterai, j’avais vraiment mis un trait sur le rugby, c’est vrai que je ne pensais pas finir sur ce match-là mais le fait qu’Albi me propose ensuite ce genre de poste-là, je reste dans le club d’Albi, je connais Albi, je connais le Tarn puisque j’ai été formé à Albi et à Castres donc ça me permettait de rester dans le rugby. De toute façon, j’allais rester vivre à Albi donc c’est vrai que c’était une très belle opportunité pour moi de rester dans un club que je connais, j’ai passé 10 ans à Aurillac et je connais le modèle qu’il y a, je pense qu’il y a une similitude à mettre en parallèle, c’était donc un super projet pour moi et bien évidemment que j’ai accepté. Pour revenir sur le projet, c’est surtout le projet d’un club qu’il faut bien prendre en compte, il n’y a pas que le projet d’un manager, c’est vraiment le projet d’un club avec l’association et la SA et ça, c’est quelque chose qu’il faut vraiment prendre en compte. C’est tout le projet d’un club et pas que d’une équipe première, c’est vraiment le projet global d’un club où on essaye de prendre un virage.
En prenant ta retraite sportive, tu laisses vacant le poste de capitaine. D’après toi qui va prendre la suite pour le capitanat ?
Ça, ce n’est pas à moi de le dire.
Quel est ton état d’esprit pour aborder cette nouvelle partie de ta vie ?
Un état d’esprit comme un jeune qui fait sa rentrée. J’écoute, j’écoute beaucoup, je pose des questions, je passe toutes mes journées avec Jean-Jacques et j’ai la chance qu’il me fasse participer et écouter à tout. Je suis là pour apprendre, je ne pensais pas avoir cette opportunité-là donc quand je me réveille le matin, je suis pleinement satisfait du tournant de ma carrière et je suis très content d’être là.
Propos recueillis par Loïc Colombié
Article en partenariat avec
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