Jean-Marc Aué, l’entraîneur principal des Cathares Carcassonnais, nous a accordé un entretien pour faire un point sur la situation sportive de l’USC en Nationale (actuel 5eme du classement). L’originaire de Carmaux qui a porté la tunique de l’équipe de France en 1998, est un homme satisfait de la capacité de son groupe à digérer la relégation tout comme sa propension à s’acclimater à une nouvelle division. Mais pour l’ex coach de Blagnac, Graulhet et Castres, ce championnat de Nationale, malgré son homogénéité, n’est pas à son goût assez semblable à la Pro D2 dans son organisation, pour préparer décemment à l’étage au dessus. A l’image du franc parler du manager de l’USC qui détonne dans un rugby moderne s’aseptisant à grand coup de langue de bois, du côté de la cité de Carcassonne on ne s’interdit pas de surprendre son monde en fin de saison.

Quel bilan peut-on tirer de cette première partie de saison de l’US Carcassonne qui a découvert la Nationale ?
C’est un bilan positif, en tous cas sur le plan sportif puisque nous sommes dans les qualifiables et que la situation du club au mois de Juin était plutôt négative et pleine de désespoir. Aujourd’hui, on est dans les clous sportivement donc c’est positif mais on espère toujours plus et toujours mieux, en tous cas pour moi, le manager que je suis.

Vous finissez dans les 4 premiers à la trêve, on peut donc dire qu’on est dans les clous des objectifs fixés ?
Au-delà des objectifs car quand on est reparti, on ne savait pas où on allait pour plusieurs raisons que sont la partie financière, partie sportive à cause d’une descente et d’un championnat que je ne connaissais pas et qu’on ne connaissait pas, un renouvellement de 70% de l’effectif, un staff qui passe de 4 à 2 avec pour moi des fonctions d’entraîneur manager. Cela faisait donc beaucoup d’incertitudes et, du coup, des objectifs sportifs qui n’étaient pas très élevés et aujourd’hui, nous sommes comme les équipes qui avaient annoncé vouloir être en haut du tableau donc tant mieux, c’est bien.

Tu as joué toutes les équipes de la Nationale. Est-ce que tu peux nous jeter un petit regard transversal sur cette compétition que tu as découverte ?
J’ai été très impressionné par l’équipe de Nice. C’est l’équipe qui m’a le plus impressionné autant devant que derrière, c’est une équipe qui joue bien au rugby, qui a un rugby complet basé sur la vitesse avec une belle conquête et qui est capable de bouger son ballon, d’avoir un volume de jeu important. C’est donc l’équipe qui m’a le plus impressionné et c’est peut-être pour ça qu’ils sont dans les 2 premiers mais, pour moi, il n’y a rien de surprenant. Ensuite, il y a bien sûr Narbonne, Albi qui font partie des équipes qui ont un bel effectif et qui jouent naturellement le haut de tableau, Chambéry est une équipe qui est solide à la maison, Suresnes est une belle surprise car ça joue bien au ballon puis il y a des équipes qui sont un peu plus surprenantes de par leur classement comme Bourgoin, Bourg-en-Bresse ou Massy qu’on n’attendait pas dans cette partie-là. J’ai envie de dire que c’est un championnat très équilibré où tous les matchs sont difficiles et je dirai même que tu n’as pas le droit de faire des impasses car, finalement, tous les points sont difficiles à prendre.

J’imagine que le plus gros regret de cette première partie de saison sera peut-être la défaite à domicile face à Narbonne et ce même si le match sera rejoué ?
Non, pas du tout puisqu’il n’est pas compté (rires). On aurait bien sûr aimé le gagner mais il y aurait eu la même histoire même s’il y avait eu la victoire donc ce n’est pas le match qui m’a le plus marqué. J’ai envie de te dire qu’on aurait pu gagner à Blagnac, et j’aurais préféré qu’on gagne à Blagnac car ça aurait peut-être été plus logique vu notre début de match mais on l’a finalement laissé échapper. On a aussi laissé échapper un point de bonus offensif contre Hyères-Carqueiranne La Crau sur la dernière journée en Décembre et ces deux faits font partie des regrets.

Tu as aussi un nouveau binôme cette année en la personne d’Eric Escribano et on a l’impression que ce binôme fonctionne à merveille ?
On s’est aussi découvert parce qu’on n’avait jamais travaillé ensemble, Éric connaissait la division puisqu’il y avait entraîné pendant quelque temps. On partage aussi beaucoup de valeurs en-dehors du rugby sur la façon de vivre et de voir les choses donc c’est toujours plus facile. Ça se passe bien sûr bien et puis, on a aussi envie d’amener cette équipe à la qualification, on a les mêmes envies, les mêmes objectifs et la même vision du rugby donc c’est bien.

Qui dit envie d’accéder à la qualification dit envie d’accession une fois que l’on y est ? C’est la suite logique ?
Oui, c’est la suite logique mais, à mon sens, ce serait bien qu’on se qualifie, ce serait mieux que ce soit dans les 2 premiers et ce serait parfait que l’on finisse champions (rires). Ça, ce serait la trilogie parfaite mais j’imagine que les Albigeois, les Narbonnais, les Niçois, les Chambériens, toutes ces équipes, pensent la même chose. Je sais que ça sera équilibré et quand je parle de qualification, c’est se dire qu’à partir du moment où tu es qualifié dans les 6, il reste 3 matchs et 3 matchs de phases finales donc, peut-être qu’un peu d’expérience de Pro D2 de joueurs anciens peut nous permettre de passer ces matchs-là. On va le faire étape et la première étape est d’abord d’être dans les 6 car sur ce bloc de 3, on a déjà perdu à Suresnes, on va à Chambéry avant d’aller à Massy et si on n’en gagne pas, on sortira sûrement des 6 à la fin du bloc.

Pour toi, est-ce que cette Nationale prépare bien à la Pro D2 ?
Non, pas du tout car ce n’est pas un championnat qui est fait de la même façon. Ce ne sont pas les mêmes arbitres car ils n’ont pas l’arbitrage vidéo donc, obligatoirement, ils se fient juste à leur vision ou tout simplement qu’ils peuvent parfois avoir, ou pas d’ailleurs, avec leurs arbitres de touche. Il y a un chrono qui n’existe pas ce qui veut dire qu’il n’y a pas de temps effectif et il y a des arrêts de jeu au bien vouloir de l’arbitre, il y a du jeu dangereux qui n’est pas vu parce qu’il n’y a pas de vidéo et quand on ne revient pas sur les actions, c’est tout juste la bonne appréciation de l’arbitre de champ et ensuite, on va faire un match d’access pour celui qui sera perdant de la finale avec les règles de la Pro D2. On joue un jour le vendredi, un jour le samedi, on joue le soir, on joue l’après-midi donc non, pour moi, ce n’est pas du tout adapté.

Passons maintenant sur l’année 2024 avec une première sortie de l’année à Suresnes qui n’a pas été victorieuse. Qu’est-ce qui vous a manqué pour renverser cette belle équipe de Suresnes ?
Il nous a manqué du volume de jeu. C’était un match qui était serré des deux côtés jusqu’à la 60e puisqu’on s’est retrouvé à 3-3, 6-6, 9-6 jusqu’à un 15-15 à la 60e et sur une action où il y a une erreur défensive de la part de l’un de nos joueurs et où on encaisse un essai, ils passent à +7 soit à 22-15. On n’a pas été dans la capacité de renverser la pression avec des actions qui auraient pu nous amener à marquer, on n’en a pas eu assez voire pas beaucoup et le regret, c’est qu’aujourd’hui, dans ce championnat, j’ai la forte impression et certitude que si tu multiplies les temps de jeu, ça finit soit par une pénalité pour toi soit par une action quasiment d’essai ou, en tous cas, dangereuse et Suresnes, on n’a pas été capables de produire ce jeu-là.

Ce week-end, déplacement à Chambéry, un Chambéry invaincu dans son nouvel antre du Chambéry Savoie Stadium. Le 4e qui se déplace chez le 5e, avec un objectif pour le vainqueur de mettre la pression sur Albi qui jouera le lendemain. Ce match peut être un tournant pour les deux équipes ?
Complètement et c’est ce que je te disais, on a un bloc de 3 avec 3 déplacements puisqu’on ira à Massy dans la foulée et que donc, tous les points seront importants. On va aller chercher des points à Chambéry, ce qui n’est jamais facile puisque personne n’y a gagné, c’est un club qui est ambitieux, qui a aussi des objectifs élevés et qui vient de mettre 40 points à Hyères-Carqueiranne le week-end dernier. Ils sont donc aussi un petit peu dans cette euphorie, ils vont avoir 6 réceptions consécutives si mes souvenirs sont bons donc eux sont en pleine confiance et nous, on sort d’une désillusion à Suresnes. C’est donc un match difficile à préparer, on sait qu’on sera attendu, j’ai vu qu’il y aurait un concert avec le chanteur de la Goffa Lolita, tout est prévu pour que la fête soit belle chez eux donc on va essayer de leur gâcher.

Quel est le mot d’ordre pour ce match et même pour l’année 2024 ?
Il est toujours pareil pour nous, c’est essayer de produire du jeu car gagner petit, ça ne gagne pas souvent et tu perds plutôt souvent en jouant petits bras. Je n’ai donc pas envie de jouer petits bras ni de perdre comme on a perdu à Suresnes, je préférerai qu’on perde 43 à 42 mais pas perdre comme on a perdu en ne marquant que des pénalités. Quoi qu’il arrive, il y a un gagnant et un perdant donc je préférerai gagner, ça c’est certain, et si on perd, j’aimerai que les joueurs se régalent et je n’ai pas l’impression qu’on se soit régalé à Suresnes. Le discours que je leur ai tenu est le suivant à savoir qu’aujourd’hui, si on veut aller un peu plus loin, il faut que l’on se comporte comme une équipe qui a envie d’avoir des ambitions et pour avoir des ambitions, il faut parfois un petit peu oser et aller chercher ce que personne ne te donnera, ce que nous avons peut-être la capacité à aller chercher nous-mêmes c’est à dire se déplacer, aller plus vite que les autres, mettre de la vitesse dans notre jeu, enchaîner. Le leitmotiv de 2024 est donc aller chercher quelque chose qui nous donne de belles sensations et qui nous fasse vibrer car, finalement, le rugby, c’est avant tout du plaisir, même si c’est pro, et je pense que ce jeu est bien sûr un jeu de combat mais aussi un jeu de passe.

Un petit mot et un petit clin d’œil pour le Sporting Club Graulhetois, un club où tu as gardé des racines, dont tu t’entends très bien avec les dirigeants et surtout avec ton ami Jean-Christophe Bacca qui le coache ?
C’est toujours avec beaucoup de plaisir que je les suis et que je vais les voir, car je vais régulièrement à Graulhet voir des matchs car, comme tu le disais, j’ai beaucoup d’amis en, en tous cas, une très belle relation avec Jean-Chris et beaucoup de gens au club. C’est un club qui m’a laissé de belles sensations et de belles sensations, j’espère juste surtout que ce club va rester en Nationale 2 car il le mérite. Je sais qu’il y a beaucoup de choses qui se sont faites, d’investissement, de nouvelles structures et c’est toujours pareil, quand on a de vrais projets, on a envie que ça fonctionne et, malheureusement, dans ce sport, ça ne fonctionne que quand tu gagnes donc je leur souhaite plein de bonnes victoires.

Merci et on te souhaite une belle fin de saison avec l’US Carcassonne et on te souhaite bien sûr d’accrocher les play-offs voire plus
Merci.

Propos recueillis par Loïc Colombié

Article en partenariat avec
























