#Rugby – Fed1 / B.Bagate (Perigueux) : «Ce n’est pas une révolution mais une évolution!»

Benjamin Bagate, un des coachs du CA Perigueux Dordogne a participé à notre débat sur la fédérale 1 et la mutation que cette dernière risque de connaître, via la création d’une Nationale 1 / Pro D3. Ayant connu la fédérale 1 élite, avec ses qualités et ses défauts, et accédant en en fédérale 1 avec Perigueux cette saison, l’ancien entraîneur du SO Chambéry a tenté d’analyser les enjeux d’une réforme initiée par France Rugby. Pour ce grand amoureux du Sporting Club Albigeois, la mutation qui s’opère : n’est pas une révolution mais bel et bien une évolution.

Benjamin, vous avez été promus cette saison avec Périgueux. On sait que tu es un proche de Bernard Laporte, comment est-ce que tu appréhendes cette réforme, de cette vision qu’a eue le président de la FFR pour l’avenir de la Fédérale 1 et d’une 3e division professionnelle ? 

 

BB (Périgueux) : Je vais me positionner en tant qu’entraîneur, ayant déjà évolué dans cette poule Elite avec Chambéry, une équipe qui avait un budget mais si, à juste titre, nous avions été attaquées par la DNACG. Il est clair que, sportivement, ça prépare vraiment à la Pro D2. Ça apportait vraiment un plus sportivement aux 6 / 7 premières équipes qui, à l’époque, étaient Aix-en-Provence, nous, Bourg-en-Bresse, Rouen, Albi. Maintenant, je crois que tout le monde a un peu raison et un peu tort, à savoir qu’il y a des contre-exemples pour tout. Quand on dit  » prendre 50 points  » oui, ça existe mais j’ai aussi vu Mauléon qui aurait dû gagner contre Albi cette année. J’ai aussi vu Saint-Jean-de-Luz, comme l’a dit le président, battre des gros clubs. Donc effectivement, c’est l’histoire du verre à moitié vide / à moitié plein comme le disait le manager de Drancy mais moi, je crois que c’est une bonne chose. Maintenant, je comprends les intérêts des uns et des autres, je comprends Éric Bonachera, je comprends très bien ce qu’il veut dire. Je comprends aussi le président de Rumilly, pour avoir évolué à Chambéry alors que je suis  quelqu’un du Sud-Ouest, c’est vraiment une terre de rugby. Et, après le Covid, leur enlever des derbys Chambéry, Bourgoin, Bourg, je comprends que ce soit très compliqué financièrement. Mais, il faut aussi que notre rugby évolue et ce n’est pas une révolution mais une évolution. Je crois qu’à un moment donné, si on n’avance pas, on stagne et ce sont des propositions qui sont faites qui, pour moi, sont une bonne chose. C’est mon avis personnel et, encore une fois, je me place en tant que sportif ayant évolué dans cette division mais aussi dans le Jean-Prat normal. Je comprends les uns et les autres mais pour moi, sportivement, c’est une bonne chose. 

Comment trouves-tu la position de Saint de Jean Luz, de refuser la Nationale 1? C’est une réaction pleine de sagesse?

BB (Périgueux) : Je suis totalement d’accord avec toi et on a déjà eu un débat avec beaucoup de respect pour son club. On avait aussi parlé des petits partenaires qu’il avait et c’est avec les petits ruisseaux que l’on fait les grandes rivières. Là-dessus, je n’ai aucun problème, je me suis juste positionné sportivement. Je vais être très transparent avec vous, je pense que sportivement, Saint-Jean-de-Luz avait les moyens et pouvait rivaliser dans cette poule Nationale. Je comprends que financièrement, ça ne soit pas le cas, je n’ai pas de souci là-dessus. 

Benjamin, on sait que tu es très au point sur le sujet de l’intégrité physique des joueurs et que c’est quelque chose qui te tient à cœur. On sait que Périgueux est un club avec de l’ambition qui a eu un passé illustre. Est-ce que dans l’avenir, est-ce que la Pro D3 ou Nationale 1 peut intéresser ton club ? 

 

BB (Périgueux) : Il y a plusieurs questions dans ta question. J’ai envie de reprendre la phrase que disait souvent Hugo Mola:  » faire des constats, c’est facile. Trouver des solutions, c’est un peu plus compliqué « . Je crois qu’il détient une partie de la vérité, il faut que chacun essaie de s’en sortir par ses propres moyens, sur son territoire, en restant humble et surtout en mettant l’accent sur cette formation. Je sais que c’est très compliqué, par exemple en Savoie ou en Haute-Savoie où il y a pas mal de clubs, mais je crois que l’entité à un sens là-bas, comme à Saint-Jean-de-Luz. Une partie de la solution est là mais après, évidemment, on peut très bien se dire qu’un droitier, c’est 1 500€. Par contre, si on cherche des solutions comme ils sont en train de le faire à Rumilly, peut-être qu’on va arriver à former ce droitier-là. A Rumilly, ils ont peut-être d’autres solutions. Ils ont des joueurs comme Théo Entraygues, que j’ai eu la chance d’entraîner, qui sont très heureux d’être là-bas et je crois que leurs résultats parlent pour eux. Encore une fois, ce n’est pas la solution mais c’est une partie de la solution. Quant à l’intégrité des joueurs, ça me fait rire quand j’entends certains présidents de clubs ou entraîneurs qui disent  » on va préserver l’intégrité physique des joueurs  » quand eux-mêmes dans leurs projets de jeu ne font que du défi physique. Je crois que la formation dans les centres de formation est uniquement axée sur la salle de musculation, sur le physique et nos joueurs ne sont pas prêts, notamment en 1ère ligne. Quand ils sortent d’espoirs, on a l’impression que l’on parle à de futurs internationaux mais, quand on les met en opposition sur des mêlées en Fédérale 1, même si je ne suis pas un spécialiste, c’est catastrophique pour 9/10 d’entre eux. C’est tout un schéma qui est à revoir sur la formation mais aussi sur la protection du joueur. J’essaie de m’appliquer à faire ce que je demande aux autres c’est à dire qu’un jour, je me suis dit  » qu’est-ce que je peux faire moi, au lieu de râler comme un con sur mon canapé, quand je vois de gros gabarits pendant des matches et des morts sur le terrain ? « . J’ai pris contact avec le papa de Nicolas Chauvin ainsi qu’avec d’autres personnes et j’ai essayé d’avancer un peu là-dessus. J’ai quelques solutions, comme à Rumilly ils ont quelques solutions mais je crois que l’intérêt est de tous se réunir, d’essayer de prendre les bonnes choses et d’avancer tous ensemble. Evidemment, la vérité n’est jamais un extrême d’un côté ou de l’autre mais toujours un petit peu au milieu. Par contre, que chacun d’entre nous essaye de trouver des solutions et la vérité sera là, à mon avis. Je me suis beaucoup attelé sur la protection du joueur, sur beaucoup de skills et l’idée est  » si je vois avant ce qu’il va se passer, je vais déclencher un réflexe qui va peut-être me faire éviter un choc « . C’est ce que m’avait expliqué le papa de Nicolas Chauvin. Aujourd’hui, on revient toujours sur Gabriel Lacroix, ChelsinKolbe, ces petits gabarits qui ont un sens de la vision périphérique très développé. Je crois que ça, ça ne coûte pas d’argent et que, si on inculque ça très tôt à nos gamins, on arrivera à déclencher ces fameux réflexes. Donc, je me suis penché là-dessus et je me mets à la disposition des clubs pour le développer. J’ai pas mal de demandes, ça s’est un petit peu arrêté avec le Covid mais on arrive à travailler en visio-conférences et ce sont des choses qui sont assez intéressantes. Cela fait partie des solutions mais cela n’est pas que ça. Par contre, si tout le monde amène un peu sa pierre à l’édifice, au lieu de tout le temps râler, on y arrivera. 

Benjamin, toi qui es un compétiteur, si à Périgueux, tu entends une équipe comme Bourg-en-Bresse, Suresnes ou quelle que soit l’équipe, qui chantent tout l’été  » nous, on ne veut pas jouer avec les amateurs, on ne veut pas jouer avec un tel  » et que, malheureusement pour eux, Albi et Massy montent en Pro D2. Du coup, il n’y a plus de Pro D3 et ils se retrouvent dans ta poule, tu n’as pas un peu envie de leur rentrer dedans ? 

 

BB (Périgueux) : Comme tout compétiteur. Même si tu sais que ça va être compliqué, tu vas te lancer à corps perdu et nous, on s’y lancera aussi. Après, encore une fois, il est clair qu’il y a une base économique : en-dessous de 500 / 600 000, c’est impossible d’exister en Fédérale 1, c’est une certitude. Il faut avoir un peu d’ambition, il faut aussi avoir un peu de réseau parce-que cela fait fonctionner les choses et que ça aide bien. Et puis, c’est bien français, quand on n’a pas d’argent, il faut avoir des idées. Bien sûr qu’on essaiera de bien figurer, de se maintenir parce-que, lorsque tu montes, il faut déjà te maintenir. On sait que ce ne sera pas simple mais évidemment qu’on aurait aimé se confronter à de grosses équipes juste parce-que c’est un challenge. 

Quel est le budget de Perigueux ? Sera-t-il assez conséquent pour rivaliser, quelques soit la formule?

BB (Périgueux) : Il est d’1M2. Je ne sais pas si ça va aller mais en tous les cas, si c’était un problème d’argent, ça se saurait. 

 

Il ne suffit quand même pas d’avoir le budget pour réussir (rires).

 

BB (Périgueux) : Je suis tout à fait d’accord, on se cache trop souvent derrière ça. Encore une fois, je pense qu’il faut avoir des idées. Il n’est pas évident que payer un pilier droit 1 500€ marche forcément, ça peut marcher mais ce n’est pas sûr. Comme l’a dit Frédéric Moine de Rumilly, il y a aussi le discours qui compte, il y a le projet, il y a tout ça. C’est un peu facile de trouver des excuses, je trouve qu’on peut se débrouiller. En-dessous de 500 / 600 000, c’est compliqué, c’est une certitude. 

 

On sait que si Albi et Massy montent en Pro D2, il n’y aura pas de Pro D3 et on reste dans un format à 5 poules de 12. Si Albi et Massy ne montent pas, il y aura la Nationale 1. Qu’est-ce que vous préférez comme solution ? 

 

BB (Périgueux) : Moi, personnellement, j’aimerai qu’Albi monte, pour plein de raisons tout d’abord affectives car je crois que c’est mérité pour ce club. Pour le reste, je prendrai tout ce qu’il y a. 

Propos recueillis par Loïc Colombié

https://hearthis.at/radio.albiges/magsport-15-mai-2020/

Retrouvez l’intégralité du débat fédérale 1 lors de l’émission « Le #MagSport – RadioAlbiges  » du 15 mai 2020.

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